• «2022, voyage au centre de l’abstention»:

    Libé donne la parole à ceux qui ne veulent plus voter

    Libération 3 janvier 2022 >>>>>

     

    2022, voyage au centre de l'abstention

    Abstention: à Grenoble,

    «personne ne voit les choses comme nous»

    Libération 4 janvier 2022 >>>>> Abonnés


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  • Crise sanitaire

    Coup de gueule : « Pr. Grimaldi, ceux qui ont détruit l’hôpital public doivent-ils être réanimés ? »

    « Les non vaccinés doivent-ils assumer aussi leur libre choix de ne pas être réanimés ? » s’interrogeait de façon faussement naïve ce dimanche le professeur Grimaldi dans une tribune. Alors que son texte réactionnaire épouse la rhétorique du gouvernement fustigeant les non-vaccinés, pourquoi ne pas demander des comptes à ceux qui ont détruit l’hôpital public et la confiance dans la vaccination ?

    Révolution Permanente >>>>>


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  • Assemblée nationale.

    Macron impose le passe vaccinal

    et une société à deux vitesses

     

    Mardi 4 Janvier 2022
     

    Les députés, convoqués en urgence, devaient voter la nuit dernière la transformation au 15 janvier du passe sanitaire en passe vaccinal.

    Élus PCF et FI ont voté contre un texte qui vise à « contraindre sans convaincre ».

     

    Au moment d’appeler les députés à transformer le passe sanitaire en passe vaccinal, Olivier Véran s’est voulu grave : « Chaque seconde, plus de deux Français sont contaminés par le Covid et diagnostiqués comme tels. Le raz-de-marée est vertigineux. » C’est pourquoi le ministre de la Santé a présenté un douzième texte de loi visant à lutter contre la pandémie et à encourager la vaccination. À l’entendre, son contenu permettrait d’ « éviter des choix plus brutaux », tel un confinement. Olivier Véran assure également qu’il ne s’agit pas d’une loi « contre les libertés », mais « pour sauver des vies, protéger nos hôpitaux et soulager la charge de travail des soignants ». Ce texte, qui devait sans surprise être voté dans la nuit de lundi à mardi, instaure pourtant des interdictions aux personnes non vaccinées : interdiction d’accès aux activités de loisirs, dont les théâtres et cinémas ; interdiction d’accès aux restaurants et bars ; interdiction d’accès aux transports publics interrégionaux.

    Contrôles d’identité à-tout-va

    Dès son examen en commission, entre Noël et le jour de l’An, les élus communistes avaient fait savoir qu’ils voteraient contre. « Nous partageons depuis le début cette conviction que la vaccination est à la fois un bienfait pour nous-mêmes et un acte de protection collective. Nous revendiquons des moyens pour aller vers les plus inquiets, les plus fragiles, les plus éloignés. Nous partageons l’impérieuse nécessité de renforcer la campagne vaccinale, mais nous ne sommes pas favorables à tout acte d’autorité, voire d’autorit arisme, de nature à fracturer, à cliver chaque jour un peu plus la société française », avait déclaré Sébastien Jumel, pour qui le gouvernement ne cesse de « durcir à chaque étape des atteintes fondamentales aux libertés individuelles sans jamais tirer le bilan de leur efficacité dans la lutte contre le virus ».

    Le député PCF s’est de plus indigné contre une autre disposition du texte : celle de permettre les contrôles d’identité « par des personnes non dépositaires d’une mission d’ordre public, ce qui est contraire à l’État de droit ». Le projet de loi prévoit en effet que toutes les personnes devant demander la présentation d’un passe vaccinal pourront réclamer la présentation d’une pièce d’identité. Tous les groupes de gauche, ainsi que les députés LR, ont appelé à faire marche arrière sur le sujet, sans succès. Tous les groupes de gauche ont également appelé à stopper les fermetures de lits dans les hôpitaux, et à lever les brevets sur les vaccins afin de permettre une vaccination mondiale et rapide, mettant fin au développement permanent de nouveaux variants. La fin des remboursements des tests pour les non-vaccinés a elle aussi été dénoncée. En vain.

    Entre autres reproches, la députée PS Cécile Untermaier a estimé que ce texte « ne traite pas de cette fracture que nous ne voulons pas dans notre pays : les 5 millions de non-vaccinés ne sont pas nos ennemis. La frilosité par rapport au vaccin ARN est toujours là. Beaucoup attendent d’autres vaccins et beaucoup de vaccinés s’inquiètent d’un rappel tous les trois mois ». L’élue indique en outre qu’elle n’a pas constaté « une augmentation significative des primo-vaccinations après l’annonce du passe vaccinal, malgré la déferlante Omicron ». Pour autant, les parlementaires PS ont annoncé leur volonté de voter pour ce texte, « par principe ». Même son de cloche du côté des députés LR. « Beaucoup de Français se posent des questions sur l’accumulation des mesures inadaptées prises par le gouvernement et sur les contraintes qui se rajoutent les unes aux autres », a annoncé Ian Boucard, dont le groupe a pourtant prévu de voter le texte.

    Comme les communistes et les députés Libertés et territoires, les élus insoumis ont par contre souhaité le repousser. « Vous nous avez convoqués pour valider votre décision de créer deux catégories de citoyens dans notre pays : les vaccinés et les non-vaccinés », s’est alarmée Mathilde Panot. « Qui est responsable du chômage ? Les chômeurs ! De la pauvreté ? Les pauvres ! De la maladie ? Les malades ! » a ironisé Jean-Luc Mélenchon, dénonçant un texte qui avance vers une « société totalitaire ». Enfin, la proposition de ­Sébastien Jumel visant à ce que chaque non-vacciné soit rencontré par un professionnel de santé a pour sa part été ignorée par le gouvernement.


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  • Sans oublier que ce sont les mutuelles

    qui vont devoir raquer...

    et les mutuelles c'est qui ?

     

    Santé. Aux urgences, le gouvernement fait les poches des plus précaires

    Mardi 4 Janvier 2022

    Conçu pour « simplifier » la tarification des soins et améliorer le recouvrement des impayés, le forfait de 19,61 euros pour les passages aux urgences non suivis d’hospitalisation devrait surtout plomber les patients sans mutuelle.

     

    C’est une mesure qui devait entrer en vigueur le 1er janvier 2021, mais qui a été repoussée en raison de l’épidémie de Covid. Il faut croire que la cinquième vague n’aura pas convaincu le gouvernement d’y surseoir une nouvelle fois. Depuis samedi, les hôpitaux ont pour consigne d’appliquer un forfait de 19,61 euros aux patients dont le passage aux urgences ne serait pas suivi d’une hospitalisation. « Le FPU (forfait patient urgences – NDLR) remplace concrètement le forfait ATU (accueil et traitement des urgences) de 27,05 euros, auquel s’ajoutaient, pour former l’ex-ticket modérateur, les coûts des soins, examens et actes prodigués », explique le ministère de la Santé et des Solidarités. « À ce titre, il rend le montant d’un passage aux urgences sans hospitalisation plus lisible pour les patients et les usagers ; son paiement plus compréhensible, donc plus automatique, et sa facturation plus simple pour les équipes hospitalières », soutient le gouvernement.

    Règlement immédiat ou différé ?

    Harmonisation et simplification : le mantra est connu et même rituel dans la bouche de l’exécutif quand il s’agit de réformer les services publics. À demi-mot, le ministère reconnaît que le but est aussi d’améliorer le recouvrement des impayés, espérant ainsi faire rentrer 35 millions d’euros dans les caisses. Tout en soutenant que ce changement sera indolore pour les patients, couverts pour 95 % d’entre eux par une mutuelle qui prendra en charge ce forfait. Les personnes en accident du travail et en maladie professionnelle (AT/MP) dont l’incapacité est inférieure à deux tiers et celles placées en affection de longue durée (ALD) bénéficieront, elles, d’un forfait réduit de 8,49 euros. En outre, seront exonérées certaines catégories de patients (femmes enceintes à partir du sixième mois, nourrissons de moins d’un mois, donneurs d’organes pour les actes en lien avec leur don, mineurs victimes de violences sexuelles, victimes de terrorisme, titulaires d’une pension d’invalidité, invalides de guerre et personnes rattachées au régime AT/MP dont l’incapacité est au moins égale à deux tiers).

    Les urgences continueront-elles d’envoyer une facture a posteriori aux patients ou exigeront-elles le règlement immédiat du forfait ? Sur ce point, le ministère ne semble pas avoir tranché, laissant aux hôpitaux le soin d’organiser leur propre système de facturation.

    « Cette mesure va taper sur les plus précaires, c’est-à-dire les chômeurs, ceux qui n’ont pas de mutuelle et qui constituent une grande partie de nos patients », dénonce Frédéric Adnet, chef du service des urgences de l’hôpital Avicenne de Bobigny, également à la tête du Samu de Seine-Saint-Denis. « Ce genre de réforme laisse aussi à penser qu’un passage aux urgences non suivi d’une hospitalisation serait indu, alors que pour certaines pathologies, comme de la petite traumatologie – si vous vous cassez une cheville, par exemple – ou une colique néphrétique, le passage aux urgences est bien justifié, même si on vous laisse repartir après vous avoir soigné », souligne le médecin.

    Une offre de soins carencée

    « Sur la mise en place pratique, c’est une usine à gaz : les personnels administratifs sont déjà en sous-effectif, si on leur demande en plus de faire de la facturation et du recouvrement, ça va coincer », estime Patrick Bourdillon, secrétaire fédéral CGT santé. « Et sur le principe, c’est inacceptable : les gens ne viennent pas aux urgences par plaisir, mais parce qu’ils n’ont pas accès à un médecin de ville. On était déjà sur une médecine à deux vitesses, mais ce genre de mesure accélère la transformation du service public vers une logique libérale », déplore le syndicaliste.

    Du côté des usagers, on reste vigilant sur l’application de ce forfait. Reconnaissant que ce tarif uniforme de 19,61 euros a le mérite d’être « plus simple et plus lisible pour l’ensemble des acteurs du système de santé », France Assos Santé, qui regroupe 84 associations de patients, s’est dite « pas opposée au principe de la forfaitisation ». Mais le collectif invite le gouvernement à se pencher « en premier lieu » sur le manque de structures de santé. « Le problème reste (…) l’hétérogénéité, voire la carence, d’offre de soins de premier recours sur les territoires, obligeant parfois les usagers à se rendre aux urgences faute de structure de soins de proximité disponible, a fortiori le soir et le week-end. »


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  • Fiscalité. L’ascenseur social bloqué à l’étage des héritiers

     

    Mardi 4 Janvier 2022
     

    En France,

    les 10 % les plus riches s’accaparent 60 % du patrimoine total.

    Les niches fiscales liées aux héritages leur permettent de se transmettre ce grisbi de génération en génération.

    Des économistes et institutions appellent à une réforme de la fiscalité sur les successions.

     

    Sortez vos capes, gants et hauts-de-forme ou vos robes à corset : la Belle Époque est de retour.

    Ce n’est pas la mode vestimentaire du moment qui le suggère, mais les économistes comme les institutions qui scrutent les évolutions de notre société.

    Aujourd’hui comme au début du XXe siècle, la France appartient aux héritiers rentiers.

    Si le siècle dernier avait corrigé le tir, notamment grâce à l’ascenseur social des Trente Glorieuses, la fin des années 1970 a sonné le retour du patrimoine financier et immobilier comme facteur majeur de structuration de classe, bien plus que les revenus (salaires et revenus du travail).

    Ce patrimoine qui pèse de plus en plus lourd – de 300 % du revenu national en 1970, il en représentait 600 % en 2020 – a été progressivement capté par quelques-uns.

    « En France, les 10 % les plus riches possèdent 60 % du patrimoine total net », soulignait le « Rapport 2022 sur les inégalités mondiales », publié en décembre par l’Observatoire des inégalités mondiales.

    Cette monopolisation des richesses est devenue à ce point dérangeante que des institutions peu révolutionnaires comme l’OCDE, France Stratégie ou des économistes orthodoxes qui parlent à l’oreille de Macron, tels le prix Nobel Jean Tirole ou l’ex-directeur des études du FMI Olivier Blanchard, s’en inquiètent et appellent à une nouvelle fiscalité des successions et des héritages.

    Histoire de débloquer un ascenseur social coincé aux étages supérieurs.

     

    « Il devient indispensable d’avoir hérité pour accéder au sommet de la distribution des niveaux de vie », analyse Camille Landais, coauteur du rapport « Repenser l’héritage » , publié par le Conseil d’analyse économique (CAE) il y a quinze jours.

    De fait, quand la moitié des Français héritent de 70 000 euros tout au long de leur vie (il s’agit d’une moyenne, nombre d’entre eux n’hériteront de rien du tout), moins de 10 % récupéreront plus de 500 000 euros de patrimoine.

    Quant au « top 1 % des héritiers, il recevra en moyenne plus de 4,2 millions d’euros nets de droits.

    Et le top 0,1 %, environ 13 millions »,

    souligne l’étude du CAE.

    Autrement dit, « le top 1 % des héritiers peut désormais obtenir, par une simple vie de rentier, un niveau de vie supérieur à celui obtenu par le top 1 % des ’’travailleurs’’ ».

    De quoi enterrer le mythe du « premier de cordée » et de la méritocratie.

     

    Tigre de papier et niches fiscales

    En ces temps de creusement des inégalités sociales, de renchérissement des dépenses du quotidien et d’aspiration des première ou deuxième lignes comme des premiers de corvée à des augmentations de salaires, l’opulence des rentiers relève du scandale alors que la transmission de ces fortunes n’est que faiblement taxée.

    Elles n’ont rapporté que 12,5 milliards d’euros en 2015, soit 0,56 % du PIB, alors que le flux total des transmissions patrimoniales annuelles pèse 15 % du PIB.

     

    Tout semble avoir été fait pour que l’administration fiscale ne s’intéresse pas au sujet.

    Celle-ci ne possède d’ailleurs pas de données fiables.

     

    D’autre part, comme l’explique Camille Landais,

    « nous pouvons avoir l’illusion d’une progressivité de la taxation des successions, mais c’est un tigre de papier.

    Dans la réalité, plus les patrimoines sont importants, mieux leurs titulaires connaissent les niches qui permettent d’échapper à leur imposition.

    Si bien que les plus gros transmetteurs ne sont taxés en moyenne qu’à hauteur de 10 % ».

     

    Parmi les niches fiscales, citons

    l’assurance-vie (17,5 milliards répartis entre 45 000 bénéficiaires seulement) ;

    les pactes Dutreil, qui exonèrent à 50 % la transmission des biens professionnels représentant plus de 60 % du patrimoine des 0,001 % les plus fortunés ;

    la donation en nue-propriété avec réserve d’usufruit (2 à 3 milliards de manque à gagner pour le fisc) ;

    ou l’effacement des plus-values latentes à la succession.

     

    À ces mesures de sous-évaluation de l’assiette de la taxation des héritages s’ajoutent les autres ficelles de l’optimisation d’héritage.

    Par exemple, planifier rapporte gros : trois donations de 100 000 euros au cours d’une vie ajoutées à un héritage de 200 000 au décès de chacun des deux parents coûtent moins cher en droits de succession qu’un héritage de 700 000 euros versé d’un coup au décès des ascendants.

     

    Imposer à des taux croissants

    Sur tous ces biais, les rapports précédemment cités appellent à revenir dessus.

    Avec un leitmotiv : assurer une réelle progressivité de la taxation des héritages fondée sur le bénéficiaire tout au long de sa vie.

    « Les transmissions d’un montant total élevé pourraient être imposées à des taux croissants, tout en permettant aux nombreux parents de la classe moyenne de transmettre un patrimoine plus modeste à leurs enfants en franchise d’impôts », note la commission Tirole- Blanchard.

    Ce qui contribuerait à améliorer la mauvaise image de cette fiscalité, vue comme « une double imposition de l’épargne de parents qui ont “travaillé dur ” et qui souhaitaient aider leurs enfants ».

     

    Selon les scénarios proposés par le rapport du CAE, ces mesures dégageraient entre 9 et 19 milliards d’euros.

    Qu’en faire ?

    De la baisse d’impôts indirects ou directs à la réduction de la dette publique, l’abondement des mécanismes de solidarité et d’égalité des chances jusqu’au financement d’un capital garanti de 120 000 euros pour tous dès 18 ans, comme le proposait l’économiste Thomas Piketty, les projets ne manquent pas.

    Ils relèvent tous d’un projet de société dont les candidats à l’élection présidentielle ont la possibilité de s’emparer.


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  • Morbihan

    Fin d'un feuilleton judiciaire.

    Les éoliennes de Guern vont devoir être démontées

    Publié le 03/01/2022
     
    La plus haute juridiction administrative a tranché. L'implantation et l'utilisation des éoliennes de Guern sont bien illégales. Les installations vont devoir être démontées. Si l'exploitant s'exécute...
     

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  • Mais oui on va le croire...

     

    Présidentielle :

    "Veiller au pluralisme va être très important",

    affirme le président de l'Arcom

    France Info >>>>>


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  • Covid.

    Pour Philippe Terral,

    « La pandémie révèle la défaite

    de l’économie triomphante »

     

    Dimanche 2 Janvier 2022
     

    Peut-on aborder la pandémie uniquement sous l’angle de la santé et du biomédical ?

    C’est en substance ce que réfute le sociologue et directeur du CreSco à Toulouse Philippe Terral, qui prône un meilleur recours aux sciences sociales pour analyser de manière pluridisciplinaire la façon dont les sociétés et les individus ont été bouleversés, pour longtemps, par la pandémie de Covid-19.

    Entretien.

     

    Confinements, couvre-feux, restrictions de déplacement, passe sanitaire, scolarité perturbée, violences intrafamiliales, morts par millions…

    Dans l’ouvrage Pandémie, un fait social total, qu’il a codirigé avec la philosophe Marie Gaille, le sociologue Philippe Terral montre que «l’expérience collective mortifère » que constitue la pandémie soulève de nombreuses interrogations et réflexions intimes et sociales. 

    C’est pourquoi il revendique une meilleure appréhension de la crise sanitaire au prisme des sciences sociales.

     

    Quelle est la genèse de cet ouvrage et comment avez-vous travaillé avec la philosophe Marie Gaille ?

    Philippe Terral

     

    Ce livre est l’aboutissement d’une forte mobilisation des chercheurs en sciences humaines et sociales et de la volonté des directeurs de l’Inserm et du CNRS de mettre en place une opération commune afin d’amener des éléments de compréhension à la situation que nous traversons.

    Nous avons sollicité environ 80 chercheurs.

    L’idée était de proposer un ensemble agrégé – opération certes un peu périlleuse – de leurs recherches respectives afin de faire valoir une partie du capital des connaissances en sciences humaines et sociales qui pourrait servir en temps de pandémie.

     

    Vous montrez que la pandémie a été un véritable amplificateur d’enjeux sociétaux préexistants, avec la montée en puissance des inégalités sociales, de genre, territoriales… Pensez-vous que ces aspects soient occultés ?

    Philippe Terral

    La lecture de cette crise, qualifiée de sanitaire, a surtout été biomédicale, alors que les sciences humaines et sociales se penchent sur la façon dont les gens la vivent.

    En biologisant la crise, souvent, on ne parle pas beaucoup des individus, de leur vécu, du contexte précis.

    Il y avait en ce sens un enjeu pour nous d’apporter de l’humain, du social, du sociétal.

    De fait, nous montrons des aspects qui préexistaient largement à la crise, avec des inégalités très fortes qui s’accroissent partout dans le monde.

     

    Cette crise en a été un révélateur et montre combien gouverner avec uniquement des indicateurs de macroéconomie ou les seules connaissances biologiques éloigne les décideurs des préoccupations quotidiennes des gens.

    N’envisager la situation que par le prisme d’une discipline, d’un regard, ne favorise pas la gestion du bien commun.

    Quand une expertise devient hégémonique, elle élude tout autre aspect.

     

    En ce sens, la crise met en lumière la défaite d’une certaine économie triomphante et hégémonique comme l’impossibilité de ne porter qu’un regard biologique sur la pandémie que nous avons traversée.

    On l’a vu, tous les critères économiques de gouvernement des États ont volé en éclats dans le cadre de ce que l’on peut appeler une certaine panique organisationnelle pour gérer le bien commun.

    Le fameux « quoi qu’il en coûte » a été formulé alors que nous étions depuis des années dans des politiques beaucoup plus contraignantes concernant la dépense publique.

     

    Pourquoi ce biopouvoir que vous décrivez est-il en partie au cœur de la crise traversée ?

    Philippe Terral

    Le philosophe Michel Foucault parlait déjà de biopouvoir et a produit des analyses très riches sur le sujet.

    On sait depuis que, sur les questions de gouvernement des corps, que ce soit dans le domaine de la santé, du travail ou même du sport, il y a une expertise dominante qui est celle de la biologie.

    Ce biopouvoir est intéressant à analyser car il renforce souvent très fortement les pouvoirs centralisés, donc la dimension « jupitérienne » du pouvoir.

     

    Par le prisme de la biologie, dont il ne s’agit pas pour autant de nier la pertinence et l’intérêt fondamental pour les populations, on tend à effacer les singularités de profils individuels ou de territoires.

    Peut-on gouverner toutes les parties du territoire français et tous les individus de la même façon ?

    Sans pour autant que ce soit simple à prendre en compte, les sciences humaines et sociales aspirent à ouvrir le regard sur les singularités, les spécificités et sur la prise en compte des points de vue des citoyens et des usagers dans leur diversité.

     

    En ce sens, la crise pandémique a d’ailleurs beaucoup mis de côté les enjeux de démocratie sanitaire.

    On aurait pu imaginer une prise d’informations de ce que souhaitaient les gens.

    Ça aurait changé complètement la gestion de la crise si, par exemple, on avait demandé aux personnes âgées ce qu’elles préféraient.

    Plus globalement, cette pandémie participe donc à révéler davantage ce que certains qualifient de crise démocratique.

     

    Vous abordez aussi largement ce sentiment d’impréparation qui se dégage au vu de l’action des autorités et du gouvernement. Domine-t-il à juste titre les perceptions ?

    Philippe Terral

    Plusieurs de nos collègues ont notamment travaillé sur la gestion de crises antérieures, en particulier de crises sanitaires comme la grippe aviaire.

    Ils constatent finalement que les autorités ont très peu appris du passé, ce qui interroge sur le fonctionnement de nos gouvernements et sur les capacités d’expertise mobilisées.

    Par exemple, la France a manqué de masques alors que des stocks avaient été faits, puis défaits pour réaliser des économies dans la gestion, ou parce qu’une autre actualité était plus prégnante.

    On pourrait porter la même analyse sur l’hôpital et, plus globalement, sur les services publics.

     

    Au final, il s’agit de choix politiques en lien avec une vision de ce qu’est le bien commun.

    Force est de constater, par exemple, qu’au début de la pandémie, nos gouvernants étaient davantage tournés vers la préparation des élections municipales que vers la gestion d’une épidémie en train d’arriver.

    Pourtant, des alertes et des connaissances existaient sur le sujet, tant sur les questions sanitaires qu’environnementales.

    Un des enjeux de la lecture de cette crise étant aussi de rapprocher les problématiques sanitaire et environnementale.

     

    En post-scriptum de votre livre, vous vous adressez aux décideurs. Qu’attendez-vous d’eux ?

    Philippe Terral

    Nous prônons d’abord et avant tout une pluralisation des expertises, même si, bien sûr, c’est plus facile à déclarer qu’à mettre en œuvre.

    Si l’on veut de la démocratie en aval, il en faut bien en amont, non ?

    La vision scientifique ne s’arrête pas au biologique.

    De même, si les expertises des chercheurs sont indispensables, il ne faut pas écarter celles du vécu des gens, qu’il s’agisse des usagers mais aussi des décideurs, des intervenants au quotidien.

     

    En France, on gouverne souvent de façon très centralisée et depuis des connaissances très générales, très peu adossées à la singularité des vécus et des contextes des personnes.

    Or, la prise en compte des ressentis et de la diversité des points de vue citoyens est nécessaire.

    Et c’est en partie aux sciences humaines et sociales de jouer ce rôle.

    C’est sûr que nous n’allons pas pouvoir changer du jour au lendemain des systèmes organisationnels centralisés, structurellement très installés.

    Mais il nous faut les faire évoluer si nous ne voulons pas nous enfoncer dans une crise de la démocratie.

     

     

    Pandémie, un fait social total, sous la direction de Marie Gaille et Philippe Terral. Éd CNRS. 18 euros.

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  • Harcèlement : un dispositif de signalement mis en place au sein des services du premier ministre

    L’instauration de ce dispositif intervient

    après plusieurs enquêtes

    révélant le management brutal

    au sein de certains services de Matignon.

    Le monde >>>>> 1er Janvier 2022


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  • Diplomatie.

    À la tête des 27,

    Macron brandit la « souveraineté européenne »

     

    Vendredi 31 Décembre 2021
     
     

    C’est au son de « l’Ode à la joie », l’hymne européen, que Macron était intronisé chef de l’État en 2017.

    Depuis, il promeut l’autonomie stratégique.

    Qu’en est-il de ce concept qu’il va chercher à mettre en musique à l’occasion de la présidence française de l’Union européenne ?

     

    Être chef d’un État français où le rôle du Parlement a été diminué et où le gouvernement n’est plus que la chambre d’enregistrement de ses décisions ne suffit plus à Jupiter.

    Du 1er janvier au 30 juin 2022, Emmanuel Macron endossera les habits de président de l’Europe. Pour la première fois depuis treize ans, la présidence tournante de l’Union européenne (UE) sera assurée par Paris.

    En fait, il ne s’agit pas d’une présidence à proprement parler, mais d’un exercice de médiation entre États membres pour faire avancer des dossiers déjà sur la table.

     

    Toutefois, ce sera l’occasion pour le président de la République qui, le jour de son élection, le 7 mai 2017, s’était fait applaudir devant le Louvre par ses partisans sur la musique de « l’Ode à la joie », l’hymne européen, de mettre en avant sa vision de l’Europe à l’approche du scrutin suprême.

    Au cœur de son projet, on trouve le concept de « souveraineté européenne ».

    De quoi s’agit-il ?

     

    « Relance, puissance et appartenance »

    Le mot a été utilisé une première fois par François Hollande.

    C’était le 7 octobre 2015, à Strasbourg, devant les parlementaires européens.

    « La souveraineté n’a rien à voir avec le souverainisme. La souveraineté européenne, c’est être capable de décider pour nous-mêmes et éviter que ce soit le retour aux nationalismes, aux populismes, aux extrémismes qui nous imposent aujourd’hui d’aller dans un chemin que nous n’avons pas voulu », déclare alors le président socialiste.

     

    En écho, près de deux ans plus tard, dans un discours fondateur devant le Parthénon, en Grèce, Macron annonce qu’« il est temps d’affirmer que, sur les grands défis de notre époque (sécurité, migrations, commerce, numérique), la vraie souveraineté passe par une action européenne, dans un cadre démocratique renouvelé ».

     

    Chez les deux présidents, qui font face à une montée du populisme qui instrumentalise la « souveraineté nationale », on retrouve l’idée que, face à la perte d’influence et de pouvoir des États-nations, plus de souveraineté (de compétences) doit être transférée à Bruxelles, mais également qu’un sentiment d’appartenance européenne est nécessaire.

    Le slogan de la présidence française de l’Union européenne (Pfue) est d’ailleurs « Relance, puissance et appartenance ».

     

    Un vrai fourre-tout

    Cette notion de souveraineté européenne conduit à retrouver, au niveau continental, la souveraineté nationale, qui est menacée par les interdépendances fruit de la mondialisation.

    D’où certains grands thèmes mis en avant : pacte sur l’immigration et l’asile ; climat ; Europe de la défense.

    Mais le concept devient fourre-tout.

    Jeudi 9 décembre, les ministres ont présenté leur projet pour la Pfue aux présidents de groupes au Parlement européen.

    « Nous avions face à nous 11 ministres, dont 2 femmes, témoigne Manon Aubry, coprésidente du groupe La Gauche.

    Chacun des ministres a pris la parole, a pris le mot “souveraineté” et y a accolé son domaine de compétence : “souveraineté industrielle”, “souveraineté sanitaire”, “souveraineté climatique”. »

     

    Pour l’eurodéputée France insoumise (FI), l’usage même du terme «souveraineté » est une « victoire culturelle, car elle est contradictoire avec la politique menée par Emmanuel Macron au niveau européen, notamment avec les accords de libre-échange qui sont signés à la pelle ».

    « L’interdiction faite aux États de venir en aide aux entreprises stratégiques, sauf pendant la période du Covid, va à l’encontre de la souveraineté qu’ils veulent défendre », avance la députée, pour qui parler de souveraineté européenne « ne signifie pas qu’à la fin on ait une Europe plus forte et plus protégée ».

     

    La défense et la question migratoire. Tout un programme !

    Cette souveraineté européenne, telle qu’énoncée par Emmanuel Macron lors d’une conférence de presse présentant sa présidence, le jeudi 9 décembre, repose sur deux piliers : l’Europe de la défense et la question migratoire.

    Tout un programme !

    Pour Vincent Boulet, responsable des questions européennes du Parti communiste français (PCF), le concept de souveraineté européenne pose « plusieurs problèmes ».

    « Il est bizarre de parler de souveraineté européenne quand l’idée de souveraineté stratégique est liée au sommet de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (Otan) qui se tiendra à Madrid en juin 2022.

    On ne peut parler de souveraineté quand celle-ci est si liée à l’Otan », organisation dominée par les États-Unis.

    Au vu de l’état des rapports de forces européens, l’Europe de la défense est condamnée à n’être qu’un pilier de l’Alliance atlantique.

     

    L’insistance macronienne sur la question migratoire est plus que problématique.

    « Ce qui est inquiétant dans l’intervention de Macron, c’est la manière dont il s’aligne sur ce que disent les conservateurs en Europe.

    Ouvrir comme il l’a fait son discours sur les migrants, c’est donner un blanc-seing aux pires des gouvernements, comme celui de la Pologne, qui laisse mourir les migrants de faim et de froid aux frontières de l’UE », dénonce le responsable du PCF.

    Macron a promis une aide policière.

    « C’est honteux, cela replace au centre du jeu la Pologne, qui était mise à l’index du fait de son non-respect de l’État de droit », accuse Vincent Boulet.

     

    Conforme au marché

    Faute de s’affronter aux conceptions libérales de la Commission européenne et des traités européens, la « souveraineté européenne » devient un mot creux loin de la véritable exigence d’une souveraineté populaire.

    Après la crise financière de 2008, la véritable patronne de l’UE, la chancelière allemande Angela Merkel, avait parlé de « marktkonforme Demokratie » (« démocratie de marché »).

    Cette conception ordolibérale, au cœur du modèle germanique, est désormais largement partagée sur les bancs sociaux-démocrates, libéraux et conservateurs du Parlement européen.

    C’est avec celle-ci qu’il faudrait rompre.

     

    Pour cette présidence, Emmanuel Macron espère contribuer à « bâtir un cadre budgétaire et financier crédible, simplifié, transparent, capable de contribuer à cette ambition d’une Europe plus forte, plus juste et plus durable ».

    Il souhaite retrouver des marges de manœuvre pour des investissements pour le climat, la formation ou de nouvelles filières industrielles.

    Le Conseil d’analyse économique (CAE), une officine de Matignon, a déjà émis des propositions pour remettre en cause la règle en vigueur depuis le traité de Maastricht (1993) selon laquelle un déficit public ne peut excéder 3 % de PIB.

    C’est un progrès, mais, souligne Vincent Boulet, il s’agit d’instaurer de nouvelles règles budgétaires « associées aux nouveaux besoins du capital », non au développement des services publics.

    Si question de souveraineté il y a, c’est celle de « la libération des peuples face aux besoins du capital ». 


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