• Résolution adoptée par le Mouvement Ensemble!

    sur le mouvement des Gilets jaunes

    9 Janvier 2019


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  • GILETS JAUNES :

    AVEC LEUR COMBAT,

    CONTRE LES DÉRIVES ANTISÉMITES

     

    • 25 déc. 2018
    • Par Robert HIRSCH
     
    Ce samedi, les Gilets jaunes ont encore surpris tout le monde. Leur lutte n'est pas finie, comme le croyait le pouvoir. Mais il y a eu des dérives antisémites inacceptables
     

    Le samedi 22 décembre aura été le jour des surprises : personne ne s'attendait à ce que la mobilisation des Gilets jaunes se maintienne, ce qu'elle a réussi à faire à deux jours de Noël, même s'il y avait moins de monde cette fois. Cela montre que les reculs du gouvernement, réels, ne suffisent pas, tant est grand le mécontentement qui a explosé à l'occasion de cette mobilisation. Ce mouvement n'est pas terminé et il conviendrait que les gauches, Edwy Pleyel l'a écrit, l'appuient avec plus de détermination. Mais aussi sans cacher leurs désaccords avec certaines manifestations problématiques.

    Or, ce samedi, il y eut un gros problème sur les marches du Sacré-Cœur à Paris. Un groupe non négligeable de GJ faisait la quenelle antisémite de Dieudonné, l'un d'entre eux au moins faisant même le salut nazi. Le même jour, dans le métro, des Gilets jaunes, éméchés, insultaient une vieille dame qui leur avait demandé de cesser le geste ignoble de la quenelle. Quelques jours plus tôt, une banderole ciblait des responsables juifs. Tout cela montre qu'une partie du mouvement, certes minoritaire et sans doute inspirée par l'extrême droite, confond le rejet d'un système injuste avec la désignation d'un bouc-émissaire, toujours le même depuis si longtemps.

    Quel est le rôle de la gauche dans ces conditions ? Tweeter que l'antisémitisme est inadmissible, comme Clémentine Autain, Yann Brossat ou Esther Benbassa l'ont fait  très vite. Certes. Mais aussi expliquer aux GJ qu'ils se trompent d'adversaire et tout faire pour qu'ils ne se laissent pas entraîner part ces fascistes qui gangrènent le mouvement. La décapitation de Macron à la manière de Daesh, ce n'est pas mieux. La haine des individus ne conduit à rien, elle détourne des vraies questions, elle est toujours d'extrême droite. Ces dérives sont d'autant plus problématiques qu'il y en eut sur les migrants, les noirs, les homosexuels... Un des leaders facebookiens, parti du prix de l'essence, en arriva à considérer qu'il y avait top de musulmans en France !

    Alors, à part ces quelques personnes citées (à féliciter), la gauche a-t-elle réagi aux événements de samedi ? Le NPA a fait un long communiqué où une ligne dénonce "des propos haineux". Pourquoi ne pas dire les mots : "Juifs", "antisémitisme" feraient-ils peur ? Il fut un temps où la Ligue Communiste n'hésitait pas à dire ces mots et à dénoncer les antisémites. Quant à Jean-Luc Mélenchon et Manuel Bompard, ils ont réclamé la libération d'Éric Drouet, un des leaders, peu progressistes du mouvement des GJ, mais n'ont rien dit sur l'antisémitisme. Les leaders des GJ, si prolixe sur tout et rien, n'ont pas jugé utile de facebooker, semble-t-il. Ils ont tort : ces dérives décrédibilisent leur mouvement.

    Soutenir les Gilets jaunes de manière opportuniste, sans rien dire sur les dérives de certains, cela ne mène la gauche à rien, cela lui fera juste perdre son honneur. Et cela laisse le gouvernement dénoncer presque seul ces dérives. La gauche, ce n'est pas se taire pour ne pas choquer les pauvres, Ou alors ce n'est plus la gauche, c'est peut-être cela le problème. Et c'est bien souvent sur l'antisémitisme que la gauche s'est tue, au début de l'affaire Dreyfus comme ces dernières années. 

     

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  • La leçon des gilets jaunes aux gilets rouges

    Par Jacques Bidet,
    Philosophe,
    membre d’«Ensemble!».
     
    22 décembre 2018
     

    La mobilisation de ces dernières semaines doit servir de leçon à la gauche populaire, incapable de surmonter ses divisions. Plutôt que de multiplier les partis et les mouvements, elle doit constituer des collectifs locaux, lieux de débats et d'action citoyenne.

     

    La «gauche populaire», appelons ainsi celle qui s’est retrouvée sur le vote Mélenchon à la présidentielle de 2017, a vu les gilets jaunes reprendre une bonne part de ses revendications. Et pourtant elle n’en ressort pas revigorée. A-t-elle vraiment compris la leçon qui lui a été administrée ?

     

    Elle prétend «donner le pouvoir au peuple». Mais elle est elle-même incapable de le laisser à son propre «peuple». Ses fractions rivales aspirent, chacune, à montrer aux autres la voie à suivre, voire à les englober. Aucune d’elles ne peut rassembler le tout, encore moins y inclure le potentiel révélé par les gilets jaunes. Toutes, au fond, se résignent à l’idée qu’on réglera finalement au mieux les comptes au sommet, par voie de petits arrangements. En attendant, chacune va de son côté à la défaite générale.

     

    Le paradoxe est que leurs perspectives sont plus convergentes que jamais. La France insoumise ne parle plus de plan B pour l’euro. Les communistes se sont démocratisés. Génération·s a rompu les amarres avec le vieux PS. L’exigence écologique, portée par les Verts est devenue une charte pour tous. Chacun bien sûr a son point fort, son point d’honneur, et surtout ses intérêts propres. Mais, en 2012 déjà, l’existence d’un programme commun avait ramené l’espoir et permis de regrouper les forces. En 2017, l’effondrement, les divisions et le discrédit du PS et le ralliement des Verts, avaient permis de rassembler près de 20 % des suffrages sur un candidat commun. Et voilà à nouveau la division !

     

    La surprise vient du côté des gilets jaunes. Ils ont montré que l’on peut faire de la politique «autrement» : à l’horizontale. On a vu toute une population, supposée plus ou moins hors-jeu, manifester une conscience et une compétence insoupçonnées, capable de mener à l’échelle du pays une action de longue durée qui laissera des traces dans la culture nationale. Il ne s’agit pas, pour la gauche populaire, de mimer les gilets jaunes. Elle doit simplement comprendre que le «peuple» auquel elle s’adresse ne la prendra pas au sérieux tant qu’elle n’aura pas changé sa pratique politique.

     

    L’idée est simple, et certains la mettent en avant depuis 2012. Ce que ne peuvent ni la forme «parti», ni la forme «mouvement», l’une menacée de sclérose bureaucratique, l’autre de dérive charismatique, seule le peut la forme «collectif».

     

    Que les diverses organisations de la gauche populaire, sans rien abandonner de leur identité ni de leur dynamique propre, appellent à la constitution, en chaque localité ou circonscription, de collectifs dans lesquels se retrouveront toutes les personnes, membres ou non d’un parti, d’un syndicat ou d’une association, prêtes à s’engager sur les grandes orientations communes. Et qu’elles reconnaissent à ces collectifs locaux, où elles seront elles-mêmes présentes et influentes à travers leurs membres, la pleine responsabilité politique à leur niveau : la charge de mener le combat social et citoyen, de proposer des candidats aux élections locales et nationales, etc. Non pas de simples «assemblées générales», souvent utiles mais par essence volatiles, mais des collectifs durables et incontestables par leur forme démocratique d’association. La remontée disciplinée vers le sommet n’est pas très difficile à concevoir, l’essentiel étant que le collectif central soit issu des rangs des collectifs de base et demeure sous leur contrôle, et par là d’autant plus capable d’imagination, d’initiative et de réaction.

     

    Les différents partis et mouvements, présents et à venir, y trouveront leur espace naturel, où ils se développeront selon leur culture propre, à partager comme un bien commun. Mais le pouvoir restera ancré en bas. Cela exigera, bien sûr, quelques principes corrélatifs d’organisation tout simplement démocratiques. En tout premier lieu, la limitation de la réitération des mandats, s’agissant tant des dirigeants que des candidats présentés aux charges électives, les uns et les autres ayant amassé, au terme de leur engagement, un capital de pouvoir qui est à rendre au peuple.

     

    Ce n’est qu’ainsi que pourra naître, aujourd’hui en France, une grande force politique populaire, diverse et cohérente. Et ce peuple d’ouvriers et d’employés, de chômeurs et d’indépendants, ce grand nombre dont les gilets jaunes sont l’image et le symbole, et qui s’est révélé si «politique», pourra peut-être y reconnaître les siens.

     

    Jacques Bidet Philosophe,
    membre d’«Ensemble!».
     
     
    Auteur de «"Eux" et "Nous"? Une alternative au populisme de gauche» (Kimé, 2018)

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  • Ensemble Hautes Alpes 05 !

    Une inquiétante inhumanité

     

    Les humains sont physiquement et mentalement des marcheurs.

    Derrière la colline, au delà de cette mer, qu'allons-nous trouver ?

    La marche est le moteur de la curiosité, de l'espoir d'une vie meilleure, en tout cas nous marchons depuis toujours, de là ce devoir d'hospitalité que toutes les sociétés admettent comme constitutive de leur humanité.

     

    D'ailleurs la Déclaration des Droits de l'homme de 1948 dans son article 13 entérine ce fait anthropologique comme un droit fondamental :

    "Toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l'intérieur d'un État.

    Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien et de revenir dans son pays".

     

     

    Il faut croire que les gouvernements successifs de la France sont illettrés car ils n'ont pas su transposer ce droit dans notre législation.

    A preuve, le jugement condamnant les 3+4 de Briançon au motif d'aide à des personnes "en marche" lors d'une manifestation politique de dénonciation des racistes de Génération Identitaire qui prétendaient interdire la marche au Col de l’Échelle.

     

    Ainsi, face à face deux conceptions de l'humanité.

    Une qui s'ancre dans les profondeurs de l'histoire faite d'hospitalité et d'accueil

    et une autre profondément réactionnaire qui voudrait retourner à un temps qui n'a jamais existé, celui d'une humanité immobile.

    D'un côté la vie, la mort de l'autre.

    Trente mille personnes sont mortes en Méditerranée entre 2010 et 2017, trois mille de plus en 2018 et trois sont mort.e.s dans nos montagnes!

     

    En condamnant les 3+4 de Briançon, le tribunal de Gap, sourd aux arguments de la défense, s'est condamné lui-même du délit de non solidarité avec les humains.

     

    Nous saluons ces porteurs et porteuses d'humanité que sont les 3+4 de Briançon et ceux/celles qui les ont précédé.e.s sur mer, à Vintimille, dans la Roya et à Calais.

     

    Ensemble 05 – P.A.C.G.

    15 décembre 2018


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  •  Le fond de l’air est jaune 

    Soulèvement populaire pour la justice fiscale et le pouvoir d’achat, les gilets jaunes cristallisent la convergence de toutes les colères contre Emmanuel Macron et, au-delà, le capitalisme néolibéral mondialisé dont il est le nom.

    De l’événement gilets jaunes ou de la structure du macronisme, qui va digérer l’autre ?

    Le simple fait que la question se pose est déjà extraordinaire.

    Un examen de clinique politique rudimentaire ne peut que renforcer le constat.

    L’arrogance de classe présidentielle et sa proximité avec les milieux financiers ont beaucoup contribué à faire monter la pression dans la cocotte-minute qui explose aujourd’hui.

    Mais la question politique posée par les gilets jaunes dépasse le cas Macron.

    Une fissure historique est ouverte.

    La tâche de toutes les forces anticapitalistes est d’élargir la brèche.

    Sur le site national d'Ensemble ! >>>>>


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  • Quel débouché politique ?

     

    C’est la question que l’on se posait vers fin mai 68, quand il était clair que le mouvement syndical ne pouvait aller plus loin.

    Il s’agissait de savoir sur quel programme s’engager, comment rassembler les forces populaires et s’assurer qu’on ne volerait pas au peuple sa victoire.

     

     

    Le contexte diffère sur deux points.

    Sur les grandes questions programmatiques, sociales et écologiques, les diverses forces de la gauche populaire affirment leur convergence.

    Et voici qu’au-delà de ce cercle une autre fraction du peuple, souvent restée à l’écart de « la politique », est entrée en lutte.

    Elle réclame, précisément, un débouché politique.

     

     

    Les gilets jaunes ont inventé une nouvelle pratique politique, décentralisée, fondée sur l’initiative locale, sur une circulation horizontale, sur le refus de délégations, et pourtant capable de conduire une action à l’échelle nationale.

    Cela « a parlé » à toute la nation.

    Mais pour quelle suite ?

    Les révoltes populaires du passé se retrouvaient au final isolées face à un pouvoir tout-puissant.

    Il existe aujourd’hui des forces politiques qui peuvent se reconnaître dans ces nouveaux militants.

    Le « débouché politique », c’est la rencontre entre leur pratique politique et la nôtre.

     

     

    Le mouvement est parti des taxes sur les carburants.

    Mais on a vu rapidement monter la conscience politique, les revendications de pouvoir d’achat, de services publics de proximité, de démocratie.

    Des gens, femmes et hommes, que l’on n’attendait pas sur le sujet – ouvriers, employés, artisans, petits paysans et commerçants, chômeurs, modestes retraités – se sont montrés incroyablement compétents face aux micros tendus des télévisions.

    Et ils prétendaient s’organiser eux-mêmes, prendre les choses en main.

    Et c’est à partir de là précisément que se pose la question du débouché politique.

     

     

    Quelle forme d’organisation politique, donc, pourrait répondre aux attentes de cette autre moitié du peuple qui ne se retrouve pas dans nos partis et organisations ?

    Bien sûr, ces deux mondes se chevauchent parce que la vie les rapproche et les mélange.

    On doit pourtant se demander pourquoi ça communique si mal entre eux.

    Certains penseront qu’ils ont tout à apprendre de nous.

    Mieux vaudrait se demander quel tournant on devrait prendre dans leur direction pour que cette énorme énergie ne se dissipe pas aussi vite qu’elle est apparue.

     

     

    Il ne s’agit pas de mimer les gilets jaunes.

    Mais d’en venir à une « forme-collectif ».

    Non que la « forme-parti » serait désuète.

    Je la tiens pour très précieuse, s’agissant notamment du Parti Communiste, qui est pour tous un bien commun.

    Comme le sont aussi les partenaires, Verts, Insoumis, Génération et autres.

    Mais aucune formation n’est capable de rassembler la gauche populaire, encore moins d’y inclure le potentiel révélé par les gilets jaunes.

     

     

    L’horizon ne se dégagera que lorsque ces partis, divers mais convergents, se seront décidés à laisser le pouvoir à leur peuple.

    C’est-à-dire, tout en conservant leur identité et leur activité à tous les niveaux, à appeler à la constitution, dans chaque lieu, ville ou circonscription, de collectifs locaux rassemblant toutes les volontés militantes, et à leur reconnaître pleine responsabilité politique.

    Pas de simples assemblées citoyennes, mais des collectifs durables par leur forme démocratique, ouverts à toutes les personnes prêtes à s’engager.

    Avec convergence au sommet dans un collectif central issu de leurs rangs et sous leur contrôle, et d’autant plus capable, à chaque moment, de prendre l’initiative et de donner l’impulsion.

    Jacques Bidet

     

     


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  • Comité d'Ensemble ! Nice/agglo et vallées

    jeudi 6 décembre 2018  

    GILETS JAUNES, MOBILISATIONS SOCIALES 

    ET SITUATION POLITIQUE 

    LES ENJEUX D'UNE EXPLOSION SOCIALE 

       

    On peut faire le constat d'une crise politique majeure, une véritable crise de régime. Alors que le pouvoir avait tenu droit dans ses bottes face aux manifestations contre la loi travail, face aux mobilisations des cheminot-e-s, pour la première fois, il recule. Même si c'est pour lâcher des miettes, c'est symbolique de la peur qui a saisi le pouvoir. Peur qui se voit aussi dans les flottements, les contradictions dans les annonces faites pour essayer de mettre fin à la situation.  

       

                On a donc sous les yeux une véritable explosion sociale. Cela se traduit par une radicalisation de la répression, des menaces de recourir à l'armée et à l'état d'urgence. Il y a une véritable fuite en avant répressive qui vise a écraser les mobilisations et qui révèle une aggravation autoritaire très dangereuse. Mais la possibilité de la chute de Macron est réelle d'autant que des secteurs de l'appareil d'État semblent fragilisés avec une « grogne » chez les policierˑeˑs et des arrêts maladies en cascade chez les CRS. Les préfets eux-mêmes expriment quasi-publiquement des inquiétudes ce qui est révélateur de la crise du pouvoir.  

                On peut donc passer très vite dans tout autre chose avec un niveau d'enjeux politiques beaucoup plus élevés et des possibilités radicales, le meilleur comme le pire.  

                L'événement central de la situation est bien évidemment le mouvement des Gilets Jaunes.  

       

    1 / Les Gilets Jaunes (GJ) :  

       

             C'est un mouvement profondément populaire. Les quelques analyses sociologiques (encore très impressionnistes) montrent une présence massive d'ouvrierˑeˑs et d'employéˑeˑs avec aussi des professions intermédiaires et des petits patrons. La présence féminine est importante. C'est donc une France populaire majoritairement salariée qui s'est mobilisée, mais pas toute la France populaire comme le montre l'absence de mobilisations GJ dans les quartiers populaires. 

                    Mais il ne faut pas voir dans ce mouvement la France du périurbain et des campagnes contre la France des villes. D'une part parce que la précarité et la pauvreté sont plus importantes dans les villes que dans le périurbain et le rural, d'autre part parce que tout le périurbain et tout le rural ne sont pas marqués par la précarité et la pauvreté. 

                    Il s'agit surtout de la mobilisation d'une partie des excluˑeˑs de la mondialisation dans le périurbain et les banlieues résidentielles contre ce que Macron incarne : libéralisme débridé, finance incontrôlable et, encore plus décisif à mes yeux pour comprendre le déclenchement des GJ, mépris de classe qui s'exprime sans honte aucune. Macron incarnant cela, il cristallise une véritable haine.  

       

                    Au cœur de la situation actuelle on trouve le sentiment d'une injustice profonde. La focalisation initiale sur la taxe sur les carburants a pu faire penser à un mouvement principalement anti-fiscal. Mais très vite, la question de l'injustice fiscale est devenu la question centrale. Deux écueils à éviter dans l'analyse du mouvement : le mépris de classe et une vision misérabiliste des couches populaires qui voient un mouvement forcément manipulé, ici par l'extrême droite ; une vision « populiste » qui voit forcément le bon et le vrai dans le populaire. 

       

                On trouve une grande hétérogénéité d'idées chez les GJ, entre les régions mais aussi à l'intérieur d'un même barrage. La présence de l'extrême droite est réelle dans certains endroits. Il y a eu des actes homophobes, racistes. Il y a des idées complotistes qui se diffusent parmi les GJ. Mais les thématiques abordées insistent de plus en plus sur la question sociale et la répartition des richesses. On retrouve cet aspect dans le « programme » des GJ : on a des propositions sociales fortes mais on trouve aussi une proposition anti-migrantˑeˑs et une proposition assimilationniste. Cette hétérogénéité ambiguë se situe dans un contexte international favorable à l'extrême droite.  

       

                    C'est un mouvement révélateur de la crise de la politique et de la crise de la gauche politique et sociale. Il y a un discrédit total des forces politiques qu'elles soient ou non liées au pouvoir. La démocratie représentative et la Vème République apparaissent à bout de souffle. 

                    La gauche est frappée de plein fouet par cette crise d'autant plus que le PS a mené des politiques néolibérales violentes et que le PC n'organise plus les couches populaires. La FI, qui a su capter une partie du vote populaire, n'a pas remplacé ce vide. De plus, les organisations syndicales ne semblent plus du tout à même de représenter et structurer les couches populaires. 

                    La restructuration néolibérale de l'économie a entraîné une perte d'influence majeure des syndicats : toute une partie du salariat ne se sent plus du tout concerné par les syndicats d'autant plus que des syndicats ont mené des stratégies d'accompagnement des politiques néolibérales.  

       

    Ce mouvement des GJ est donc aussi le fruit de nos échecs.  

       

                Dans ce contexte, nos tâches sont très importantes car les potentialités sont immenses et en même temps il y a de lourds dangers. Si l'extrême droite arrive effectivement à imposer son hégémonie sur les GJ, ce sera alors une voie royale pour elle et la possibilité d'un processus de fascisation étant donné qu'il y a très clairement une crise dans la capacité de la bourgeoisie à maintenir son hégémonie sur la société. Dans le cas de l'effondrement du mouvement par épuisement, le désespoir sera encore plus grand et là encore l'extrême droite ne pourra qu'en profiter. Enfin, en cas d'écrasement du mouvement par la répression, une transformation de plus en plus autoritaire de l'État sera à l'œuvre, facilitant là-aussi de possibles processus fascistes.  

       

                    Mais une portée progressiste des mobilisations est envisageable à condition que les militantˑeˑs progressistes interviennent en direction des GJ. C'est compliqué mais il y a des points d'appui pour le faire. 

                    D'une part, l'affrontement avec l'État et des phénomènes d'auto-organisation peuvent entraîner des expériences politiques rapprochant certainˑeˑs GJ de la gauche radicale. 

                    D'autre part, la question de l'injustice est un point d'entrée pour nous : la question de l'injustice fiscale et la question symbolique de l'ISF sont fondamentales dans cette perspective d'autant plus que l'extrême droite n'est pas du tout à l'aise sur ce terrain. Nous avons sous estimé l'importance de ce sujet pour les couches populaires dans nos matériels et nos activités politiques. Il nous faut dénoncer fortement la TVA et les taxes sur la consommation qui sont injustes et valoriser les impôts progressifs. Ça doit devenir central dans nos discours. Et on sera beaucoup plus crédibles sur les thèmes de la fiscalité et de la transition écologique. Nous pouvons aussi entrer par la question de la démocratie active car il y a un fort potentiel de remise en cause des institutions de la Vème République. On voit ainsi apparaître des appels à des assemblées populaires parmi des GJ.  

       

                    L'hégémonie d'extrême droite n'est donc pas du tout une fatalité à condition que les organisations progressistes soient à la hauteur en particulier celles de la gauche radicale. Mais cette hégémonisation progressiste potentielle (pas au sens d'une mainmise organisationelle, qui n'est ni souhaitée - c'est un euphémisme - ni souhaitable et sûrement impossible de toute façon, mais au sens d'une ambiance idéologique) ne se jouera pas seulement sur cette capacité à intervenir en direction des GJ. Elle se jouera aussi dans la capacité à créer une ambiance politique générale progressiste. 

                Quatre éléments semblent importants pour cela : le mouvement syndical, la mobilisation lycéenne, les mobilisations dans les quartiers populaires notamment de l'antiracisme politique et les mobilisations pour le climat. Toutes ces mobilisations sont impactées par les GJ et auront un impact sur les GJ.  

       

    2 / Le mouvement syndical  

       

                La capacité du mouvement syndical à organiser des mobilisations fortes sur les questions d'injustice fiscale et de répartition des richesses sera déterminante. D'une part, pour le mouvement syndical lui-même et sa crédibilité en tant que force de transformation sociale. D'autre part pour faire monter le niveau de mobilisation générale et pour construire des ponts avec les GJ. 

                    La CGT doit jouer ici un rôle majeur. Pour l'instant elle est loin d'être à la hauteur de la situation. Il y a d'abord eu le rejet d'une mobilisation noyautée par l'extrême droite, rejet compréhensible dans les premiers jours de l'annonce de la mobilisation, mais qui aurait nécessité une révision en profondeur étant donné ce qui s'est passé le 17 novembre et après. Mais cette révision a été d'une grande timidité et s'est traduit pour l'instant à l'échelle de la Confédération par un élargissement de la mobilisation du 1er décembre et par un appel à une « journée d'action » le 14 décembre. Et le 6 décembre, la CGT et la FSU ont signé une déclaration intersyndicale honteuse et irresponsable. Seul Solidaires a refusé de signer ce texte. La direction de la confédération semble perdue et semble ne pas du tout avoir pris conscience des enjeux du moment. Cela ne peut qu'accentuer le sentiment de déconnexion entre les directions syndicales et les salariéˑeˑs.  

                Au niveau local, le niveau de combativités des militantˑeˑs syndicaux/ales apparaît beaucoup plus élevé. Des militantˑeˑs sont présentˑeˑs dans les mobilisations des GJ. Des intersyndicales locales appellent à la grève et à soutenir les GJ. Ils et elles participent donc à créer des liens avec les GJ. Des Unions départementales et des syndicats de la CGT ont fait remonter à la Confédération leur colère et leur incompréhension.  

                Il nous faut donc pousser dans nos syndicats à ce que la question de journées de grève interpro soit posée avec la perspective de la grève générale.  

       

    3 / Les mobilisations lycéennes  

       

                Mobilisation massive et inattendue rendue possible par l'existence des GJ. 

                    La répression est hallucinante, faisant des la protection des lycéenˑneˑs une priorité. 

                    Mobilisation qui touche aussi beaucoup les lycées pro, ce qui était moins le cas des dernières mobilisations me semble-t-il. 

                    Mobilisation d'une grande importance pour nous, étant donné son ampleur, sa détermination et parce que cela donne une tonalité anti-autoritaire à la période. 

                    L'extrême droite n'aime pas les mobilisations lycéennes.        

                Les lycéenˑneˑs n'hésitent pas à tisser des liens avec les GJ, certainˑeˑs étant des GJ. 

                    Début de mobilisation dans les universités. Un élément supplémentaire important en fonction de ce que ça deviendra.  

       

    4 / Les quartiers populaires et les mobilisations anti-racistes  

       

                L'absence des quartiers populaires dans la mobilisation des GJ est problématique. 

                    La méfiance initiale est compréhensible mais il y a eu des bougés depuis : le Comité Adama a appelé à la jonction avec les GJ. Le Collectif Rosa Parks a lui affirmé qu'il y avait des préoccupations communes avec les GJ. On a pu voir des GJ dans les tribunes les plus populaires du Vélodrome (et dans d'autres stades). 

                    Les mobilisations dans les lycées pro et les réactions à la répression hallucinante montrent que des secteurs des quartiers populaires commencent à se mobiliser. L'expérience de la violence d'État par les GJ peut tracer des convergences. 

                    Tout cela peut contribuer à combattre le racisme à l'intérieur des GJ et à fragiliser la place de l'extrême droite. Ce sera très compliqué.  

                Un autre aspect compliqué concerne la question de l'accueil des migrantˑeˑs. C'est surement une des plus grosses difficultés : c'est là-dessus que l'extrême droite est la plus offensive et que les rumeurs complotistes se diffusent le plus. Il nous faut donc réfléchir à comment les collectifs de solidarité avec les migrantˑeˑs pourraient s'adresser aux GJ sur cette question précise et porter cette problématique au sein de ces collectifs.  

       

    5 / Les mobilisations pour le climat  

       

                La prise de conscience de l'urgence climatique s'est accélérée ces derniers mois. Un élément important dans la construction d'un rapport de force progressiste à l'échelle de l'ensemble des mobilisations actuelles. L'un des enjeux est de lier justice fiscale/sociale et justice climatique, répartition des richesses et transition écologique. Cela doit permettre de proposer un discours écolo efficace aux GJ et aussi de renforcer le pôle d'écologie politique populaire au sein des mobilisations climat. L'existence des GJ apparaît ainsi comme une chance pour développer ce second aspect à l'échelle de la société. ATTAC a eu une attitude exemplaire. C'est un acteur clé pour agir dans cette perspective.  

       

                Nous sommes loin de partir gagnant étant donné l'état de la gauche politique et sociale et les dynamiques de la période à l'échelle internationale. Mais sans des mobilisations qui prennent en compte les potentialités et les enjeux des GJ, le pire est certain. Il est de notre responsabilité d'avoir une activité offensive, qui intègre les enjeux de l'explosion sociale à laquelle nous assistons, dans l'ensemble des cadres de mobilisations auxquels nous participons.


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  • Climat et justice sociale,

    même combat !

    Ensemble ! Tract 6 décembre 2018

    Format A4

    .

    Format A5


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  • Ensemble 69 (Rhône - Lyon) : Lettre 69 de décembre 2018

    Voilà le dernier numéro de notre Lettre 69

    (Métropole de Lyon et Rhône)

    dans sa version numérique ...


    Elle est aussi éditée sous version papier noir et blanc à 300 ex.



     


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  • Des gilets rouges aux gilets jaunes :

    la classe ouvrière introuvable ?

     

     

    Le jaune n’a généralement pas bonne presse au sein du mouvement ouvrier et celui-ci est parfois victime d’une certaine forme de persistance rétinienne.

    Pourtant si le mouvement des gilets jaunes a quelque chose à nous apprendre, c’est justement que le monde d’aujourd’hui n’a plus grand-chose à voir avec les fantômes d’hier, même si nos grilles de lecture sont restées à la traine.

     

    Mouvement de « petits patrons », mouvement infiltré par l’extrême droite ? Ce jugement pour le moins expéditif a été largement colporté par certains milieux militants. Peut-être pas sans fondement au démarrage, mais la prise de position des directions syndicales, de la CGT et de Solidaires en particulier, ont beaucoup fait pour que la réalité mouvante d’un mouvement naissant ne soit jamais abordée autrement qu’avec suspicion.

    En réalité, ce n’est pas tant le mouvement des gilets jaunes lui-même qui est compliqué que le mouvement ouvrier. Lequel finit par être de plus en plus empêtré dans ses vieux mythes au point de ne plus très bien savoir où il habite.

    Le retour des années 1930 l’obsède littéralement. Un drapeau tricolore accroché au milieu d’un barrage routier - ou le même brandi par des jeunes (souvent issus de l’immigration !) le soir d’une finale de coupe du monde et parfois doublé d’une Marseillaise - et ce serait le début d’une grande vague réactionnaire, voire la confirmation d’un « fascisme » rampant... Autant de mythes qui finissent par trouer nos mémoires et brouiller nos regards, car évidemment à cette aune, rien ne collera jamais avec nos schémas préétablis !

     

    Alors posons-nous le problème à l’inverse : comment imaginer un mouvement social réel, un mouvement de masse, dans la France de 2018 ?

    Du moins si nous prenons au sérieux nos propres analyses sur le recul de la conscience de classe, la dégradation des rapports de force (dont le résultat concret est qu’une partie du prolétariat n’a jamais participé à une seule journée de grève depuis des dizaines d’années !), l’éclatement de ce même prolétariat du fait des évolutions du monde du travail et trente ans de lepénisme ? Un « nouveau 68 » qui surgirait de nulle part ? Sociologiquement et politiquement comparable ?

     

    La formule a fini par devenir un carcan, même si elle a été brandie comme un drapeau par de nombreux gilets jaunes. Un carcan car comment imaginer un « nouveau 68 » dans un pays qui n’a plus rien à voir avec celui des années 1950-1960 ? Celui de l’après-guerre, du mouvement stalinien et de la guerre du Vietnam ? Un « 68 » hors-sol, hors contexte ? Comme si le seul problème cette fois serait qu’il aille « jusqu’au bout » ?

     

    Samedi, c’est à Paris que cela va se passer !

     

    La première chose est donc de remettre les compteurs à l’endroit et d’éviter de faire comme le vieux Delescluze de la Commune de Paris qui pensait pouvoir rejouer 1792 dans un monde qui avait changé.

    La réalité sociale est devenue plus complexe. D’anciens prolétaires se font autoentrepreneurs et côtoient des petits patrons qui ont les mains dans le cambouis : un problème, vraiment ?

    La situation politique est devenue elle aussi plus compliquée. Mais comment pourrait-elle être autrement ? La majorité de notre classe n’a plus confiance dans les organisations syndicales ou politiques. Elle s’abstient plus qu’elle ne vote pour Le Pen, mais sur fond de « populismes » variés et nauséabonds dans toute l’Europe. Dans ces conditions, faut-il croire au miracle du Saint-Esprit ? Même dans les cortèges de grévistes cheminots, combien étaient-ils à trouver que « Marine ne dit pas que des conneries » ? Et à ne rien lâcher face aux patrons, face au gouvernement, tous ensemble ?

     

    On peut bien sûr rester au bord de la piscine et trouver que l’eau est un peu froide à notre goût. On peut aussi se dire qu’on a encore de la chance d’avoir un mouvement social qui s’en prend au « Président des riches » et qui veut comprendre où va l’argent, à quoi il sert, et pourquoi on nous taxe au moment où on supprime l’ISF, au lieu de s’en prendre collectivement et violemment aux migrants comme cela se passe aujourd’hui en Allemagne ou en Italie.

     

    Mais le temps nous est compté.

    La montée des idées réactionnaires est partout, y compris dans les quartiers populaires pourtant victimes de racisme et de discriminations.

    Face au danger, la réponse n’est pas dans la désertion.

    Elle ne consiste pas non plus à se payer de mots sur les syndicats et leurs directions qui devraient appeler à une « journée d’action interprofessionnelle », en se faisant croire que ça va être possible dans les jours qui viennent. Les directions ne sont pas prêtes et il ne suffit pas de claquer dans les doigts. Par contre la question se posera concrètement samedi de savoir si on en sera, ou pas. Il faudra en être, bien évidemment !

    Alors peut-être que les uns et les autres, nous aurions aimé que les choses se passent autrement. Mais pour l’instant, il y a ce mouvement réel et ce mouvement avance. Il se décante même à sa façon, malgré l’absence d’une partie des militants du mouvement ouvrier, même si rien n’est définitivement acquis non plus. Les patrons du transport routier ont sans doute envisagé pouvoir s’en servir. Mais le 19 novembre, le naturel a vite repris le dessus en appelant le gouvernement à dégager les barrages.

     

    Ce mouvement fait partie de notre classe telle qu’elle est et nous avons notre part de responsabilité. Non pas en agitant l’épouvantail des « fachos », en tétanisant notre milieu. Mais en faisant ce qu’ont fait les camarades de la CGT de PSA, en appelant à la grève samedi dernier, sans rien opposer.

    Nous savons désormais d’expérience que nos mots d’ordre autour des salaires et de la taxation des riches ne sont pas étrangers, encore moins rejetés par le mouvement. Encore faut-il qu’ils s’expriment en dehors des tous petits milieux de la « gauche sociale et politique » que la plupart des gens n’ont plus envie d’écouter ou ignorent tout simplement. Les interventions d’Olivier Besancenot et de Philippe Poutou par exemple , elles, sont écoutées. Leur radicalité antisystème est sans compromis avec les thèses de l’extrême droite et pourtant elles ont un écho. Samedi, il faudra que ces idées s’expriment dans les rues de Paris !

     

    JFC

    22/11/2018


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