• Sortir du capitalisme en proposant de construire l’unité des exploité-e-s et opprimé-e-s autour de revendications et d’un projet unifiant

    Débat Stratégie

    Contribution

     

    Sortir du capitalisme

    en proposant de construire

    l’unité des exploité-e-s et opprimé-e-s

    autour de revendications et d’un projet unifiant

     

    Une constatation s’impose : depuis 1995 nous avons connu des mouvements sociaux d’ampleur qui n’ont pas obtenu de victoires en termes d’objectifs revendicatifs.

    Ces défaites se sont accompagnées de reculs idéologiques et culturels.

    Cette dégradation du rapport de forces, ne nous dispense pas d’une analyse et ne nous conduit pas à cultiver un syndrome de la défaite inéluctable.

     

    Les luttes des dominé-e-s sont encore décisives.

    Depuis des décennies, la bourgeoisie n’a pas réussi en France à éliminer ce déjà-là que sont les services publics et la solidarité, idées et pratique sociale.

     

    Pourtant la société a changé.

    Un aspect suffit à le montrer : le chômage de masse et les différentes formes de précarisation comme outil central de division de la classe ouvrière et des classes dominées.

    Notre incapacité à agir sur le sujet indique que nous sous-estimons les conséquences stratégiques de la segmentation, une stratégie de désarmement des exploité-e-s par l’organisation de leur division.

     

    Dans les années 70, la gauche et le mouvement syndical n’ont pas pris en compte la radicalité.

    Elle n’a pas été traduite en objectifs.

    L‘« insubordination ouvrière » de fractions significatives du salariat mettait en cause l’organisation du travail, le pouvoir dans les entreprises.

     

    Après des tentatives autour de l’autogestion, les « anciennes » stratégies ont prévalu en visant la victoire de la gauche à la présidentielle de 1981:

    ce fut un échec pour répondre au Capital avec des défaites sur la sidérurgie par exemple, et l’inexorable dérive libérale de la gauche.

    Aujourd’hui, aux yeux de nombreux salarié-e-s en emploi, les personnes en chômage ne sont pas des « privé-e-s d’emploi » victimes d’un système qui produit les licenciements, mais des personnes « à part », moins « employables », dont certains profitent de « ceux qui se lèvent tôt ».

    D’où l’accord tacite des salarié-e-s en emploi aux sanctions contre les chômeur-euses-s.

    Pourtant, ces sanctions participent du maintien de l’ordre capitaliste dans les entreprises : le chômage-précarité est un enfer qui fait peur et génère un sentiment d’insécurité sociale généralisé.

    De leur côté, les précaires se méfient des syndicats qui les abandonnent.

     

    Ainsi, le Capital a mis en place les aspirations à la liberté

    qui devraient faire partie de nos mots d’ordre

    « libérer les travailleurs ».

     

    Pour l’heure, nous n’avons pas de réponse adaptée.

    Cette libération du travail devrait être un objectif commun.

    A condition de répondre sur la sécurisation des parcours en d’autres termes que ceux que le capital nous propose :

    échanger la sécurité contre la liberté,

    avec le chantage permanent à la réussite.

     

    Ces batailles idéologiques perdues font que des textes comme la déclaration universelle des droits ou celle de l’organisation internationale du Travail de Philadelphie (1944) apparaissent « révolutionnaires » :

    le travail n’est pas une marchandise.

    En fait, les aspirations à l’égalité, à la fraternité et à la démocratie pour toutes et tous ont résisté à la vague libérale.

     

    En fait, depuis une quinzaine d’années syndicats et mouvements de chômeurs portent revendications et projets alternatifs qui sont des réponses aux exigences sociales.

    Le droit au travail et à l’emploi et la sécurisation des parcours professionnels, la réduction massive et solidaire du temps de travail sont des pistes, depuis vingt ans adoptées par trois organisations syndicales (CGT, Solidaires, FSU). 

    Pourquoi  ne sont elles pas popularisées, et ne font elles pas l’objet de prises de positions fortes dans le débat public ?

    Parce que cet objectif exige une volonté de se regrouper sur des buts communs, une action sur le terrain syndical et dans les combats culturels et politiques que les forces politiques, de gauche radicale ou pas, ne mènent pas.

     

    Faute de retrouver une dynamique de transformation de la société, nous sommes enfermés dans le réalisme dominant et une vision du monde libérale dont Macron fait une politique.

     

    Il n’y pas d’espace pour contrer la logique d’exclusion qui se met en place sans remettre en cause le fonctionnement du « marché du travail » capitaliste, et le droit de propriété.

    Affirmer la vision « d’une société qui fasse une place à toutes et à tous » où« le travail n’est pas une marchandise1 » où réaliser « l’emploi des travailleurs à des occupations où ils aient la satisfaction de donner toute la mesure de leur habileté et de leurs connaissances et de contribuer le mieux au bien-être commun »  permet aujourd’hui de défendre les droits des chômeur-euses... mais aussi la transition écologique par la contribution au « bien-être commun ».

     

    On ne peut pas se lamenter sur la rupture avec les classes populaires, comme toutes les forces le font ces derniers mois, et ne pas mettre au centre de son action des réponses à celles et ceux qui subissent le plus violemment les méfaits du capitalisme et qui viennent de poser leurs exigences dans nombre de mouvements contre la précarisation :

    le droit au travail, au salaire, à la formation tout au long de la vie, oui !

    Pour les étudiant.e.s, pour les jeunes discriminé.e.s du fait de « leurs origines » (sic !), parmi les gilets jaunes mais aussi les EHP AD et l’aide aux personnes, la grande distribution, l’hôtellerie-restauration … mais aussi chômeur-euses, précaires et même uberisé-e-s.

     

     

    Porter ensemble - politiques syndicalistes associatifs- une campagne commune dans le débat public comme cela se fit avec la journée des 8 heures à la fin du XIX ème est une nécessité pour réinventer nos modèles et nos imaginaires,

    voilà un des buts communs que notre mouvement doit porter.

     

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    1Cette « incompréhension » fut semblable à celle vis à vis de luttes féministes ou des immigrés qui venaient corriger la centralité de la figure dominante du mouvement ouvrier, le métallo blanc.

    2 Pour les chômeur-euse-s et précaires l’appellation « privé-e d’emploi » est juste dans la mesure où elle rétablit la responsabilité du patronat dans la création du chômage-précarité de masse, mais elle ne prend pas en compte les aspirations à se libérer du lien de subordination, dans le travail ou par l’usage du travail indépendant.

    3Ce n’est pas pour rien si le même échange est proposé dans la fonction régalienne de l’Etat : abandonnez vos libertés fondamentales en échange de la protection d’un État autoritaire contre le terrorisme (et par extension la violence)

    4 FACE À CES INSUPPORTABLES INÉGALITÉS, NOUS REVENDIQUONS :
    Un emploi correctement rémunéré, librement choisi, socialement utile.
    Une indemnisation de toutes les formes de chômage et de précarité avec le SMIC comme référence , pour protéger contre la
    précarité et favoriser le retour à l’emploi. Indemnisation qui ouvrirait des droits à la retraite.
    Un financement de l’assurance chômage non plus fondé sur la seule masse salariale mais aussi sur les profits, bénéfices,
    dividendes et autres produits financiers.
    Une véritable et nouvelle réduction du temps de travail.
    L’arrêt des contrôles et des sanctions contre les chômeur.es et précaires  ; des moyens, humains afin que Pôle emploi

    5Citation de la Déclaration de Philadelphie 1944

    6Idem


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