• Pourquoi Rodolphe Saadé met-il à pied le directeur de la rédaction de la Provence ?

    Pourquoi Rodolphe Saadé met-il à pied

    le directeur de la rédaction de la Provence ?

     

    Le PDG de la CMA-CGM s’est ému d’une Une du quotidien, après le passage du président de la République dans une cité de Marseille. Il a provoqué la mise à pied du directeur de la rédaction du journal. Les journalistes se sont réunis en Assemblée générale.

    Caroline Constant
     
     
    Effarés par la séquence, les journalistes de la Tribune, qui appartient aussi à Rodolphe Saadé , devraient aussi se retrouver en AG.
     
     

    L’affaire est hallucinante.

    Le directeur de la rédaction en chef du quotidien régional La Provence, Aurélien Viers, a été mis à pied ce vendredi et est convoqué pour un entretien préalable à licenciement.

    La sanction a été directement ordonnée par Rodolphe Saadé, le propriétaire du titre, agacé par la Une du journal du jeudi 21 mars, au lendemain de l’opération d’Emmanuel Macron contre la drogue à Marseille.

    La Provence a titré : « Il est parti, et nous, on reste… », en choisissant de donner la parole aux habitants de la cité de la Castellane et à leur détresse.

     

    Sans concertation avec la direction

    Dans le camp présidentiel, à Marseille, l’affaire a fait grand bruit.

    Le conseiller régional Christophe Madrolle a relayé son indignation sur X (ex-Twitter) et a surtout passé la Une au ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, selon Le Monde.

    Et l’affaire n’a pas traîné : le jour même, Gabriel D’Harcourt, le directeur général du groupe La Provence et directeur de la publication a été convoqué par Rodolphe Saadé.

     

    Ce matin, un encart, intitulé « à nos lecteurs » barrait la Une du journal. Sans concertation avec la direction, il y est écrit : que « la citation en Une et la photo d’illustration ont pu laisser croire » que La Provence « donnait complaisamment la parole à des trafiquants de drogue décidés à narguer l’ordre public ».

    Aurélien Viers, qui était pourtant en Pologne au moment de ce bouclage, selon la lettre A, risque donc le licenciement.

    Vendredi 22 mars, les salariés de La Provence se sont réunis en Assemblée Générale. Effarés par la séquence, les journalistes de la Tribune, qui appartient aussi à Rodolphe Saadé, devraient aussi se retrouver en AG.

     

    « Je ne réagirai pas bien et je le ferai savoir »

    Rodolphe Saadé a racheté la Provence à l’été 2022, pour la somme de 81 millions d’euros. Avec les investissements, réalisés depuis dans le journal, la facture se monte à 145 millions d’euros. Il a aussi acquis, la semaine dernière, le pôle médias d’Altice, auprès de Patrick Drahi, dont les fleurets sont BFMTV et RMC.

     

    Il monte donc, de façon déterminée, un groupe de presse important.

    Mardi 19 mars, il s’est rendu justement chez Altice pour « rassurer » les équipes.

    Interrogé sur le traitement éventuel des sujets qui concernent son groupe de fret et de logistique CMA CGM, il a indiqué : « Je ne réagirai pas bien et je le ferai savoir ».

    « Il faut que l’information existe, mais il y a la manière et la manière. Je suis particulièrement déçu quand je vois qu’il y a seulement un petit encart dans les journaux quand mon groupe fait quelque chose de bien », a-t-il ajouté.

     

    La députée de la France Insoumise, Sarah Legrain, qui est aussi vice-présidente de la commission des affaires culturelles de l’Assemblée Nationale, s’en est émue jeudi 22 mars devant la ministre de la Culture Rachida Dati, qui lui a répliqué que « la loi garantit l’indépendance au regard du pouvoir économique ».

    Comme l’État est garant du pluralisme des médias, il serait peut-être judicieux de rappeler les règles du jeu aux milliardaires qui mettent la main basse sur les journaux et les chaînes de télévision.

    Même s’ils sont proches du président de la République.


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