Soirée de la Société Louise Michel le 15 mars 2016, avec Daniel Lindenberg…
« L’Enquête sur les nouveaux réactionnaires » a été publiée en 2002.
Le livre est republié cette année, avec une postface.
Il est présenté par l’éditeur comme « prémonitoire ».
En effet, le « rappel à l’ordre » est bien confirmé, avec la poursuite de la montée en puissance de ces idéologues fortement médiatisés, qualifiés par Daniel Lindenberg de « nouveaux réactionnaires » parce qu’ils sont perçus et présentés comme venant de la gauche, voire de l’extrême gauche.
Aux États-Unis, où la révolution conservatrice a commencé, elle prend une nouvelle tournure, redoutable, avec les primaires.
Et en France de nombreux thèmes portés par ces mêmes idéologues sont relayés au sommet de l’État, en particulier dans certains discours de Manuel Valls.
L’auteur décortique en expert les thématiques de ces auteurs bien installés, Alain Finkielkraut, Éric Zemmour, Renaud Camus, et quelques autres.
Dénonciation de la menace d’islamisation des sociétés européennes, déploration du déclin de l’école républicaine française, détestation de mai 1968 coupable de tous les maux…
Et, pour les plus virulents, agitation du danger d’une « dévirilisation » de la société, sans oublier la peur du spectre d’un « grand remplacement »
Daniel Lindenberg analyse le point de convergence de ces discours : l’incapacité à penser l’égalité, pour ne plus considérer que la relation dominants/dominés, avec l’angoisse du possible renversement de celle-ci.
D’où l’obsession des catastrophes à venir et la hantise du retour espéré d’un passé idéalisé, qui n’a évidemment jamais existé sinon comme phantasme !
Mais, au passage, les dégâts ne manquent pas avec la mise en crise des notions de laïcité, d’antiracisme, de droits de l’homme, qui se voient dangereusement passées au moulinet de cette pensée péremptoire, toujours médiocre.
L’orateur ayant conclu sur les ressemblances avec les années 1930, pour insister sur les évidentes différences entre l’une et l’autre période, l’échange assez nourri qui s’en est suivi a permis de mettre en lumière que l’incontestable nocivité de ces discours qui ne saurait faire désespérer des puissances progressistes toujours vivantes au cœur de nos sociétés.
Historien des idées, Daniel Lindenberg est professeur de sciences politiques à l’université Paris-VIII.
Il a notamment publié Destins marranes (Hachette, 2004), Le Procès des Lumières (Seuil, 2009) et Le Rappel à l’ordre. Enquête sur les nouveaux réactionnaires (Seuil, 2016)