• S’en prendre à la source de la production de richesse

    Comment mettre la transformation sociale

    à l’ordre du jour des élections de 2017 ?

    S’en prendre à la source

    de la production de richesse 

    par Benoît Borrits  

    Auteur de Coopératives contre capitalisme (éditions Syllepse)

    La transformation sociale, c’est l’appropriation par les salariés eux-mêmes du processus productif, c’est le dépassement des sociétés de capitaux par des unités de production autogérées par les travailleurs. Elle ne peut pas être l’œuvre d’un gouvernement quel qu’il soit, mais le résultat de l’activité propre de la classe salariée. Encore faut-il qu’une coalition progressiste arrivant au pouvoir ne bloque pas celle-ci. Hormis le fait que les deux principaux candidats de gauche sont aujourd’hui désunis et incapables d’être présents au second tour, l’un comme l’autre sont aujourd’hui tournés vers les vieilles recettes du passé qui ont déjà fait défaut en 1981 : le financement des nouveaux besoins écologiques et sociaux par une combinaison de déficits publics et d’augmentation des impôts. En ce qui concerne les déficits, l’un place la barre assez haut tout en sachant que cela signifiera probablement une sortie de l’Union européenne et de la monnaie commune. Cette sortie de l’euro ne pourra qu’avoir des conséquences désastreuses sur le pouvoir d’achat des salariés. Cette proposition n’est donc pas de nature à unifier les salariés et à ouvrir une quelconque perspective transformatrice. Pour l’autre, les ambitions sont moins élevées de façon à se placer d’office dans quelque chose d’acceptable pour l’Union européenne en termes de déficit public.

    Mais, dans les deux cas, ils s’appuient sur la croyance toute keynésienne que des dépenses publiques supplémentaires seront de nature à provoquer un choc positif sur l’économie qui la placera dans un cercle vertueux de croissance. Soyons clairs, si les thérapies de choc appliquées à la Grèce se sont avérées catastrophiques en plaçant le pays dans une récession qui a aggravé l’endettement au lieu de l’améliorer, inversement, rien n’indique qu’une augmentation du déficit est automatiquement un facteur de croissance.

    Les deux candidats entendent bien sûr financer une autre partie de ces dépenses par une hausse ciblée de la fiscalité sur les plus hauts revenus, notamment les revenus financiers. Mais laisser se former des revenus financiers pour les reprendre ensuite par la fiscalité sans s’en prendre à la structure même des entreprises est une véritable politique de gribouille. Quelle sera la motivation des possédants pour faire fonctionner les entreprises si ce qu’ils gagnent est repris ensuite par l’impôt ? Plutôt que de financer par le déficit et l’impôt, ne devrait-on pas aussi envisager un financement par des cotisations sociales à la charge des entreprises ? La hausse de la part des salaires dans la valeur ajoutée est le critère même qui permet de déterminer si un programme est de gauche ou pas. À l’inverse de la fiscalité, ce mode de financement par la cotisation a le mérite de s’en prendre à la source de la production de richesse. Il pose d’office la question de la viabilité des sociétés de capitaux et celle de la reprise de celles-ci par les salariés.

    Plutôt que la division sur le mode « plus gauche que moi, tu meurs », mieux vaut alors une unité sur un programme social unifiant à la condition que celui-ci donne l’opportunité économique, les outils législatifs et les moyens financiers pour permettre aux salariés, s’ils le souhaitent, de se débarrasser des actionnaires, de reprendre leurs entreprises. Cette perspective n’est hélas ouverte par aucun des deux principaux candidats de gauche.

     

    http://www.humanite.fr/comment-mettre-la-transformation-sociale-lordre-du-jour-des-elections-de-2017-5-633638


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