• Encore à propos du « dégagisme »

    Encore à propos du « dégagisme »

     

    ° Une réponse au texte de BDS et CL >>>>>

     

    Le texte de BDS et CL, « Dégagisme ? », est bienvenu en ce qu’il apporte des précisions utiles et invite à lever de possibles malentendus à propos du numéro zéro de la Lettre « Le jour d’après » et de la pertinence du mot d’ordre « Macron dehors ! ».

     

    La question renvoie à un moment où deux interrogations se sont croisées.

     

    ° L’une qui a partagé au sein de l’EAN de savoir si dans le communiqué il convenait d’appeler à l’éviction de Macron et du gouvernement.

    Un communiqué du groupe parlementaire LFI venait d’adopter cette position (sur le thème que les « incapables » laissent place à « ceux qui sont capables »), qui dès le lendemain ne fut pas relayée par Mélenchon et ne fut plus entendue par la suite.


    ° L’autre qui portait sur le fait de savoir si la Lettre « Le jour d’après » telle qu’annoncée dans le numéro zéro et sa « déclaration d’intention » répondait au seul souci de quelques collectifs de pallier le déficit d’expression du mouvement dan son ensemble, ou visait à porter une orientation politique précise.

    Dans le contexte, la formule gouvernementale en cause pouvait conforter cette seconde compréhension.

     

    Le texte des deux camarades permet de prendre acte qu’il faut écarter le terme et la démarche du « dégagisme », cela pour des raisons de fond.

    Ajoutons que, selon nous, la critique de la logique populiste devrait amener à la plus grande prudence dans le maniement des mots d’ordre prônant l’éviction du gouvernement.

    Pour une raison évidente : le risque de confusion avec des voix aujourd’hui fortes qui, à l’extrême droite, et aussi à gauche, sont celles d’un populisme assumé.

    Pour celui-ci le mantra « Dégageons-les ! » veut être l’expression de la colère du peuple, portée par un leader providentiel incarnant l’alternative à l’oligarchie…

     

    Est-ce que le refus de mettre en avant, dans le contexte, le mot d’ordre « Dehors Macron ! » présente le risque (grave !) de « renoncer aux soulèvements populaires et au processus révolutionnaires » et  « à nos fondamentaux, à nos objectifs autogestionnaires et révolutionnaires », pour « limiter notre horizon politique aux perspectives électorales et institutionnelles et accepter de mettre la vie parlementaire au cœur de la vie politique » ?

     

    Là, les camarades vont en effet « trop vite en besogne ».

    Il n’existe aucun doute que le pouvoir en place (comme ceux qui l’ont précédé, et comme la totalité de ceux existant dans le monde actuel) a pour nature de défendre les intérêts des privilégiés, cela par des moyens autoritaires, à quoi peuvent s’adjoindre des éléments de corruption et des recours à des répressions plus ou moins sauvages…

     

    Donc,  et pas seulement du fait de la « crise de la représentation », mais pour des raisons structurelles qui sont celles de la lutte des classes, il est légitime et impératif de contester ce pouvoir.

    Cela par les grèves, les manifestations, les émeutes…

    Et de viser son renversement.

    Par des révolutions si possible.

    Par les élections faute de mieux…

    Donc pas de malentendu entre nous sur ce point.


    Le problème est ailleurs : dans le contexte dont nous parlons, donc à cette étape précise d’un affrontement permanent (qui impose de refuser la collaboration de classes et de défendre une alternative systémique,)  comment concrétiser cette exigence ?

     

    Quelle que soit la gravité des crises en cours, la colère des classes populaires, la perte de la légitimité du pouvoir, peut-on parler d’une dynamique révolutionnaire en cours ?

    Il ne semble pas.

    Donc, quelles traductions politiques donner aux exigences susdites ?

     

    Que peut signifier l’appel au renversement du gouvernement ?

    Sans doute pas, en situation de confinement, une invitation à l’émeute.

    Donc plutôt l’hypothèse d’une démission du gouvernement, et du président, une dissolution de l’Assemblée, bref… des élections !

    Et si on prend au sérieux le mot d’ordre, comment ne pas se poser la question de l’alternative à opposer au gouvernement en place ?

     

    Les débats et les initiatives actuels indiquent des pistes possibles à soutenir pour une alternative au pouvoir en place : la jonction entre les exigences de l'appel dit des « 18 » « Plus jamais ça », s’il assume sa charge politique, et si des organisations politiques acceptent de s'articuler à celles-ci, pourraient avoir une dynamique de contre-pouvoir possible ; c’est ce qui a été proposé dans le bulletin d’Ensemble ! sur le COVID-19 sous l’expression de « Conseil national d'initiative et de contrôle ».

     

    Si cette dynamique n’est pas portée comme alternative en gestation, alors un pôle centriste, accompagnant le néolibéralisme d'ajouts sociaux et écologiques, comme l’incarne le Pacte pour le pouvoir de vivre autour de Hulot et Laurent Berger, peut se renforcer.

     

    Faute de ces dimensions liant les questions sociales, écologistes, démocratiques et politiques, exiger le départ du gouvernement sans autre forme de procès, risque de rendre difficile d'éviter les interférences avec les rhétoriques certes « dégagistes », mais sans aucun contenu.

     

    Sur tous ces problèmes, il est certes difficile de disposer immédiatement des solutions pertinentes, mais veillons à éviter des réponses aventureuses.

     

    JCMamet, RM, FS


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