• Darmanin, de la rhétorique guerrière à la stigmatisation

    Darmanin, de la rhétorique guerrière à la stigmatisation

    Jeudi 22 Octobre 2020

    Le ministre de l’Intérieur estime que c’est par les rayons de « cuisine communautaire » que « commence le communautarisme ».

     

     

    « La décence fait partie de l’hygiène républicaine. »

    La sentence prononcée lundi par le ministre de l’Intérieur sur Europe 1 pour balayer les critiques ne semblait plus valable dès le mardi soir sur le plateau de BFMTV.

    « Moi, ça m’a toujours choqué d’entrer dans un hypermarché et de voir un rayon de telle cuisine communautaire et telle autre à côté. C’est mon opinion, c’est comme ça que commence le communautarisme », y a lâché Gérald Darmanin.

    Le ministre interrogé à la suite de l’attentat de Conflans va même plus loin :

    « Qu’on aille dans un hypermarché casher ou halal pour acheter des produits, chacun peut le faire, où est le problème ?

    Je dis juste que des grandes entreprises françaises qui ont organisé parfois le marketing direct (…) ont eu envie de gagner de l’argent sur le communautarisme. »

     

    Raté pour la mise en garde d’Emmanuel Macron aux Mureaux.

    « Ne nous laissons pas entraîner dans le piège de l’amalgame tendu par les polémistes et par les extrêmes qui consisterait à stigmatiser tous les musulmans. Ce piège, c’est celui que nous tendent les ennemis de la République, qui consisterait à faire de chaque citoyen de confession musulmane un allié objectif », avait alors déclaré le président de la République.

     

    « Je n’ai pas un mot à retirer à mes propos. Pas un »

    De la rhétorique guerrière contre les « ennemis de la République » et la démonstration de force par la multiplication des opérations de police pour « faire passer un message », le ministre de l’Intérieur passe en un claquement de doigts à la stigmatisation généralisée.

    Des responsables de la majorité n’ont d’ailleurs pas tardé à se désolidariser.

    « Moi, ça ne me choque pas. Quand je fais mes courses, je vais au rayon produits bretons, parce que je suis breton », a commenté le président LaREM de l’Assemblée nationale, Richard Ferrand.

     

    « Le ministre de l’Intérieur sert de poisson-pilote dans cette affaire. Tout ce qu’on pouvait craindre après l’attentat est en train de survenir. On part d’un attentat avec une responsabilité évidente de l’islam radical et on en arrive à une stigmatisation de l’ensemble des musulmans », reproche plus sérieusement, le porte-parole du PCF, Ian Brossat.

     

    Dans la foulée, les réseaux sociaux, se sont emplis ce mercredi de railleries : on ne compte plus les photos de rayons « saveurs du monde » et autre images de crêperies accompagnées de commentaires caustiques sur les risques de radicalisation.

    Mais le ministre persiste et signe :

    « Je n’ai pas un mot à retirer à mes propos. Pas un. Oui, le capitalisme a aussi une responsabilité dans la société, tout ne peut pas faire objet d’argent. Merci d’écouter mes propos en entier. Ils sont éminemment républicains », affirme Gérald Darmanin.

    C’est en effet sous couvert de critique du capitalisme qu’il prononce sa diatribe évoquant aussi les « vêtements communautaires » ou l’argent prêté par des banques.

    « Il y a dans la société civile aussi des gens qui doivent comprendre que ce n’est pas parce qu’on a des parts de marché en flattant quelques bas instincts qu’on a rendu service au bien commun.

    J’appelle très modestement les chefs d’entreprise à se rendre compte qu’eux aussi peuvent contribuer à la paix publique et à la lutte contre le séparatisme », explique-t-il.

     

    Passons sur les « bas instincts » qui consistent à manger halal ou casher.

    « L’anticapitalisme de M. Darmanin devrait être conséquent sur tous les sujets », a rétorqué le député FI Alexis Corbière, estimant que l’assassinat de Samuel Paty devrait bien plutôt « nous interroger sur comment on en est arrivé là, sur le manque de moyens ».

     

    « Heureusement que toutes mes opinions ne font pas partie de la loi de la République », admet Gérald Darmanin.

    On ne peut qu’être d’accord sur ce point.


  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires

    Vous devez être connecté pour commenter