• Affaire Matzneff : remous dans la majorité municipale parisienne après la démission de l’adjoint à la Culture

    Vendredi, 24 Juillet, 2020

    Affaire Matzneff :

    remous dans la majorité municipale parisienne

    après la démission de l’adjoint à la Culture

     

    Entendu comme témoin dans l’affaire Matzneff, le socialiste Christophe Girard a renoncé à son poste d’adjoint à la mairie de Paris, sous la pression des écologistes et des féministes qui dénonçaient une position « intenable ».

     

    Ambiance au sein de la majorité d’Anne Hidalgo au Conseil de Paris… L’unité affichée pour le second tour des municipales entre socialistes, écologistes et communistes se fissure.

    Un cas cristallise toutes les tensions, celui de Christophe Girard.

    Sa nomination comme adjoint à la Culture de la mairie de Paris - poste qu’il a occupé entre 2001 et 2012 et de 2018 à 2020 - a scindé la majorité parisienne en deux. EELV-Paris, ainsi que des mouvements féministes, ont exigé et obtenu sa démission.

     

    La maison Yves Saint-Laurent

     

    En mars, le socialiste était interrogé comme témoin dans l’affaire Gabriel Matzneff, du nom de l’écrivain sous le coup d’une enquête ouverte par le parquet de Paris pour « viols sur mineurs » après la publication, en janvier, du Consentement, livre dans lequel Vanessa Springora raconte la relation sous emprise qu’elle a eu avec lui alors qu’elle était mineure. 

    L’ancien maire du IVe arrondissement de la capitale a été entendu par la police en tant qu’ex-secrétaire général de la maison Yves Saint-Laurent en 1986 et 1987, structure qui aurait apporté un soutien financier à Gabriel Matzneff.

    « Le collaborateur d’Yves Saint-Laurent, ce charmant Christophe Girard que j’ai vu l’autre jour, m’a appelé ce matin pour m’annoncer que leur Fondation allait désormais prendre en charge ma note d’hôtel », écrit le romancier dans l’un des ses journaux de l’époque.

    Plusieurs médias parlent également de relations « amicales » entre Gabriel Matzneff et le socialiste, à qui le livre la Prunelle de mes yeux est dédié. Ce dernier affirme également appartenir à « une génération qui considère qu’il faut séparer l’œuvre de l’auteur », mais dément être un proche de l’écrivain. 

     

    « Le problème est politique »

    Sous la pression, Christophe Girard a donc rendu son tablier, ce jeudi, afin que la maire de Paris « puisse exercer son mandat sereinement », affirme-t-il dans un communiqué.

    « J’ai 64 ans, une vie de famille épanouie et de nombreux engagements culturels, politiques et associatifs, et n’ai nullement envie de pourrir ma vie plus longtemps et de m’emmerder à me justifier en permanence pour quelque chose qui n’existe pas », ajoute-t-il.

     

    L’argument de l’absence de poursuites judiciaires ne convainc guère Raphaëlle Rémy-Leleu, élue écologiste au Conseil de Paris.

    « Il ne suffit pas d’avoir un casier judiciaire vierge pour être adjoint à la mairie de Paris, il faut aussi des qualités éthiques et morales, le soutien à Gabriel Matzneff disqualifie Christophe Girard pour ce genre de responsabilités », a-t-elle déclaré, en marge d’une manifestation devant l’hôtel de ville.

     

    Sa collègue EELV Alice Coffin abonde dans le même sens :

    « Avec les révélations des journalistes du New York Times et de Médiapart, je n’ai pas besoin d’informations en plus pour dire qu’il est révoltant que Christophe Girard soit nommé adjoint à la Culture. Ce n’est pas une question personnelle mais elle concerne Anne Hidalgo. Comme pour Éric Dupond-Moretti, le problème est politique et se pose pour Emmanuel Macron et Jean Castex. Il est grand temps qu’ils arrêtent de cautionner. »

     

    Détournement de logo

    EELV-Paris demandait la suspension de l’élu et l’ouverture d’une enquête interne à la mairie de Paris. Christophe Girard a finalement renoncé à sa fonction de façon définitive.

    « Le monde d’aujourd’hui n’est plus le monde d’hier, au regard de l’ampleur des luttes féministes et à l’heure de la libération de la parole des femmes et des citoyens. [...] Cette décision personnelle était la seule décision responsable », se sont félicités les écologistes.

     

    Mais cette démission passe mal au sein de l’équipe municipale parisienne.

    Sur Twitter, Anne Hidalgo s’est dite « écœurée » du sort réservé à son « ami ».

    Elle a dénoncé un droit « piétiné par la rumeur, les amalgames et les soupçons ».

    « (Christophe Girard) ne fait l’objet d’aucune poursuite, d’aucune plainte ou mise en cause. Il est présumé innocent… des crimes dont il n’est même pas accusé », a aussi réagi Audrey Pulvar, adjointe chargée de l’Agriculture.

    Emmanuel Grégoire, premier adjoint, exige des « excuses » d'« Alice Coffin et de (ses) partenaires écologistes » pour les « excès » des manifestants.

    Il fait ici référence aux pancartes brandies lors du rassemblement féministe où des slogans tels que « Mairie de Paris : bienvenue à Pedoland » ou celui détournant le logo de la liste de rassemblement de la gauche Avenir en commun , « Pédo en commun ».

     

    De quoi provoquer l’indignation du groupe PCF, s’estimant également visé par ces propos en tant que membre de l’exécutif parisien.

    « Faut-il le rappeler, suite à son audition en tant que témoin, aucune charge n’est retenue contre Christophe Girard à ce jour. Nous ne pouvons admettre que dans un État de droit, la vindicte de quelques-uns prenne le pas sur la justice. Nous ne pouvons travailler ensemble si la rumeur, la suspicion généralisée, l’injure deviennent la règle », prévient Nicolas Bonnet-Oulaldj, président du groupe Communiste et citoyen.

     

    « Le soutien » du groupe vert

    Alice Coffin refuse de présenter ses excuses et assure avoir « le soutien » du groupe vert.

    « Je ne renierai pas des années de féminisme une fois élue. Je ne reconnais aucun excès aux féministes », affirme-t-elle.

    Anne Hidalgo va déférer « devant les tribunaux les graves injures publiques qui ont été dirigées contre la mairie de Paris» et estime qu’Alice Coffin et Raphaëlle Rémy-Leleu se sont placées « d’elles-mêmes en dehors de la majorité municipale et des valeurs qui nous rassemblent».

     


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