• Rima Hassan, au nom de tous les siens

    La juriste franco-palestinienne essuie une vague de haine et d’accusations d’antisémitisme pour avoir défendu la voix des Palestiniens à disposer de leurs droits.

     
    Avant que sa mère ne rejoigne la France en 2002, sa famille vivait dans le camp palestinien de Neyrab, près d’Alep, dans le nord-ouest de la Syrie.
     

    Rima Hassan n’était pas née que l’histoire avait déjà décidé de son avenir.

    Consacrée en août par le magazine Forbes parmi les 40 femmes d’exception qui ont marqué l’année 2023, la juriste franco-palestinienne, petite-fille de Palestiniens chassés de leur terre à la création d’Israël en 1948, est récompensée pour son engagement auprès des réfugiés et des migrants.

    Ce que n’avait pas prévu Forbes, habitué à davantage de consensus, c’est qu’Israël allait débuter une campagne massive de bombardements sur la bande de Gaza dans la foulée des massacres perpétrés par le Hamas, le 7 octobre 2023. Pour Rima Hassan, cette guerre où plus de 30 000 Palestiniens, majoritairement civils, sont morts réveille aussi l’envie de défendre leur voix. Spécialement en France, où un large pan du personnel politique et médiatique fait montre depuis lors d’un soutien inconditionnel au gouvernement israélien. « Naître palestinien, c’est naître avec une identité politique. Impossible d’y échapper », explique-t-elle.

    Un sentiment de spoliation

    Apatride jusqu’à ses 18 ans, celle qui a fondé l’Observatoire des camps de réfugiés en 2019, une ONG autour de la question des migrants et de la vie dans les camps, a aussi longtemps été rapporteuse auprès de la Cour nationale du droit d’asile. « Le droit est ma boussole », aime à rappeler cette spécialiste des législations internationales. Ce qui lui permet de décrire le « crime d’apartheid » auquel les Palestiniens sont soumis dans leur quotidien comme une « mécanique de dépossession permanente de leurs droits ».

    Un sentiment de spoliation dont elle connaît les rouages : avant que sa mère ne rejoigne la France en 2002, sa famille vivait dans le camp palestinien de Neyrab, près d’Alep, dans le nord-ouest de la Syrie. « Dans ma famille, ce besoin d’en découdre face à l’injustice existe depuis longtemps : mon grand-père, dont ma mère me parlait souvent, était très impliqué dans les réseaux communistes. »

     

    « La colonisation des Territoires empêche l’édification d’un État palestinien. »



    Maniant le verbe avec brio, n’hésitant pas à porter des coups, la jeune femme de 31 ans s’est retrouvée projetée dans le marigot médiatique sans presque le vouloir.

    « Quelques mois auparavant, j’avais rejoint mon père, qui vit toujours dans le camp de mon enfance. Je ne l’avais pas revu depuis vingt ans. J’étais à un moment de ma vie où j’avais besoin de me
    reconnecter avec cette partie de mon histoire familiale. Quand la guerre a commencé, je ne pouvais pas me taire. »
    Ce qui ne l’empêche pas de dénoncer également les 1 200 Israéliens tués le 7 octobre : « Il est moralement inacceptable de se réjouir de la mort de civils », twitte-t-elle sur X aussitôt la tragédie connue.

     

    La cible d’une guerre de propagande

    Pourtant, à la télévision, sur les réseaux sociaux, ses mots déstabilisent une frange de l’opinion publique qui préférerait oublier la question palestinienne : « La sécurité d’Israël n’est pas liée au régime d’apartheid en place. Gaza en est la preuve la plus récente. Ce qui la garantit, ce serait la fin des persécutions vis-à-vis des Palestiniens. Encore faudrait-il que les Israéliens sortent de leur obsession démographique – de leur crainte d’être minoritaires – et acceptent de négocier sur le droit au retour », répète-t-elle, plaidant pour la création d’un État binational. En Israël, l’idée provoque un tollé tant elle remet en cause le principe d’Israël « foyer national du peuple juif ». Mais elle a l’avantage de partir du terrain. « La colonisation des Territoires empêche l’édification d’un État palestinien. »

    Dans une France où Meyer Habib, député des Français de l’étranger (LR), se permet toutes les outrances, Rima Hassan s’attire les haines rances. Fin janvier, la voilà montrée du doigt pour « antisémitisme » supposé et conspuée pour « apologie du terrorisme » dans un post Instagram de l’animateur Arthur.

    Plusieurs dizaines de comptes le relaient ensuite. Rima Hassan porte plainte, mais le mal est fait : Forbes annule la cérémonie de remise des prix pour « raisons sécuritaires ». « Ce qui me fait du bien malgré tout, c’est de me sentir soutenue », comme avec cette récente pétition signée par presque 700 élus qui s’insurgent contre son sort « ignominieux » visant au-delà de sa personne à « faire taire la Palestine et toutes les voix qui la défendent ».

     

    Israël-Palestine : « La solution, c’est un État binational démocratique et laïc », estime Rima Hassan

     
     

    Dans cette guerre de propagande, Arthur et ses « amis » ne sont pas les seuls à l’avoir prise pour cible.

    Depuis plusieurs mois, Rima Hassan est « trollée » (chassée), « doxée » (ses coordonnées personnelles communiquées sans son consentement) et, finalement, menacée de mort et de viol. « Arthur et ses amis ne pouvaient ignorer qu’ils relançaient une campagne de haine et de harcèlement à mon égard. »

    Un climat délétère en France qui l’a poussée à rejoindre la Jordanie avec le projet d’écrire le récit de ce retour vers la Palestine. « Comme palestinienne, quand je rentre chez moi”, c’est vers un camp. » En ce lieu de pauvreté et d’oppression où elle retrouve pourtant son humanité au contact d’un peuple qui refuse l’oubli depuis soixante-quinze ans.


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  • Missak et Mélinée Manouchian,

    amoureux de vivre à en mourir

    Avec une plume efficace, Gérard Streiff retrace l’incroyable biographie de ces militants communistes, à l’heure de leur panthéonisation. À travers leur histoire, le journaliste brosse l’impressionnante toile de la Résistance rouge.

     

    Missak et Mélinée Manouchian, un couple en Résistance, Gérard Streiff, édition l’Archipel, 234 pages, 21 euros.

     

    La vie de Missak et Mélinée Manouchian s’est confondue avec les grands espoirs et les pires tragédies de la première moitié du XXe siècle.

     

    Rescapés du génocide arménien, réfugiés en France, solidaires de leurs semblables accablés de souffrances, communistes, résistants, ils étaient follement épris l’un de l’autre.

    Leur amour, d’une bouleversante incandescence, s’est fracassé contre le mur de la guerre.

    Leur engagement antifasciste a pu trembler mais n’a jamais failli, même durant les heures les plus noires de l’occupation allemande et de la collaboration.

    Et puis, il y a eu la trahison fatale, celle qui a conduit à ce terrible jour de février 1944 où Missak et ses camarades francs-tireurs et partisans-Main d’œuvre immigrée (FTP-MOI) ont été exécutés au Mont-Valérien, après des mois de tortures indicibles.

    Ces étrangers sont morts pour la France, en héros, malgré la propagande nazie de l’Affiche rouge qui les a présentés comme « l’armée du crime ». Ils sont entrés dans l’Histoire.

     

    « Beau comme une statue grecque »

    Mélinée ne s’est jamais consolée de la perte de « Manouche », son mari et complice, cet homme « beau comme une statue grecque », séduisant d’intelligence et de culture dont elle est tombée amoureuse en 1934.

    Ensemble, ils ont scellé un militantisme commun.

    Ils œuvrent de concert au sein de la section française du comité de secours pour l’Arménie soviétique.

     

    La peste brune dévore l’Europe.

    La guerre les précipite dans la clandestinité.

    Missak, l’ouvrier, le sans-papiers, le poète féru de lettres, devient un combattant de l’ombre, rejoint la lutte armée et prend la tête de la direction militaire des FTP-MOI de Paris et de la région parisienne.

    Avec ses camarades, ils signeront des attaques spectaculaires.

    Mélinée dactylographie des tracts, les transporte, etc.

    Missak se sait « filoché ».

    La nuit du 15 novembre 1943, « il savait que, pour lui, que c’était la fin ».

    « Il y avait dans ses yeux à la fois de la pitié, de la crainte, et l’expression d’un immense amour inachevé », écrira bien des années plus tard Mélinée.

    Le lendemain, Missak est cueilli par la police avec son chef et figure des FTP, Joseph Epstein.

    Les deux hommes seront atrocement torturés.

    Aucun ne parlera.

     

    La plume efficace de Gérard Streiff retrace l’incroyable biographie des Manouchian, un couple devenu mythique, mais dont la vie n’a rien d’une romance.

    À travers leur histoire, le journaliste brosse avec minutie l’impressionnante toile organisationnelle de la Résistance rouge, le rôle singulier et déterminant qu’ont joué les internationalistes au nom de leur idéal.

    L’auteur ne contourne aucun sujet sensible.

    Il bat en brèche les réinterprétations historiques et idéologiques malhonnêtes qui ont parfois éclaboussé l’action de ces femmes et de ces hommes en général, et du PCF en particulier.

    L’ouvrage de Gérard Streiff est donc une contribution précieuse, à l’heure où Missak et Mélinée Manouchian vont faire leur entrée au Panthéon, en février.

     

    Pour la première fois,

    des résistants communistes reposeront

    dans la nécropole républicaine.

    Cet ouvrage est un hommage sincère à l’action des apatrides et de tous les combattants « étrangers et nos frères pourtant », selon les vers de Louis Aragon, aux antipodes des théories racistes de l’extrême droite désormais érigées en loi.


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  • Manouchian au Panthéon :

    voici comment se déroulera la cérémonie

    Le Mercredi 21 février 2024, Missak Manouchian entrera, avec sa femme Mélinée, au Panthéon.

    L’Élysée a prévu une cérémonie d'une heure trente le jour J, ainsi qu'une veillée funéraire symbolique au Mont-Valérien la veille.

    PCF et CGT vont organiser un hommage populaire.

    Missak Manouchian, Résistant, communiste, poète et ouvrier
    entrera au Panthéon pour l’éternité, le 21 février.
     

    Un communiste, poète et ouvrier entrera au Panthéon pour l’éternité, le 21 février.

    Emmanuel Macron avait annoncé, le 18 juin dernier, qu’il avait choisi le résistant arménien et chef militaire des FTP-MOI Missak Manouchian pour demeurer au sein du temple de la République, 80 après son exécution par les nazis au Mont-Valérien de Suresnes (Hauts-de-Seine).

    Il y entrera accompagné de sa femme, Mélinée, à qui il disait dans sa dernière lettre : « Je suis sûr que le peuple français et tous les combattants de la Liberté sauront honorer notre mémoire dignement. »

    Voici ce temps venu.

    Avant de rejoindre le caveau numéro XIII sur lequel un plaque distinguera aussi ses 22 camarades immortalisés dans le poème d’Aragon l’Affiche Rouge, ainsi que Joseph Esptein, le cercueil de Missak Manouchian, aujourd’hui enterré au cimetière parisien d’Ivry, remontera la rue Soufflot, couvert d’un drapeau français, porté par un régiment «lié à Manouchian », fait savoir l’Elysée.

    Il sera alors 18h30 et un parcours de lumière pavera le chemin du résistant, pour scander les trois périodes de la vie de Manouchian (génocide arménien, poète et Résistance).

    Au pied du Panthéon, sur lequel est prévu un spectacle son et lumière – un « mapping » dans le jargon – de plus de sept minutes, la garde républicaine prendra le relais pour monter les marches jusque sous la coupole.

    Reprise d’Aragon par Feu! Chatterton

    Lorsque les portes du monuments s’ouvriront, la musique du compositeur Pascal Dusapin retentira.

    A l’intérieur de l’édifice républicain, le chef de l’Etat prononcera l’oraison funèbre de Missak Manouchian, devant 1 200 invités, dont 600 scolaires et de nombreuses personnalités issues de la communauté arménienne comme Robert Guédiguian, réalisateur de L’Armée du crime.

    Les représentants politiques de l’Arménie sont d’ailleurs attendus.

    Le chanteur Arthur Tréboul, leader du groupe Feu! Chatterton, devrait alors reprendre « Strophes pour se souvenir », poème de Louis Aragon si joliment chanté par Léo Ferré.

    Une « réinterprétation moderne et extrêmement forte », promet un conseiller élyséen.

     

    Manouchian, la France reconnaissante

    La veille, le cercueil de Missak Manouchian passera sa dernière nuit hors du Panthéon dans la crypte du mémorial de la France combattante, au Mont-Valérien, où il reviendra donc « victorieux », huit décennies après sa mort.

    Il s’agit d’une demande de Jean-Baptiste Romain, directeur des Hauts lieux de la mémoire d’ïle-de-France, pour « réunir les différentes mémoires » de la Résistance dans ce lieu où reposent seize combattants de la Seconde guerre mondiale mais aucun fusillé du Mont-Valérien.

    Avant de rejoindre la crypte, les restes de l’illustre FTP-MOI accomplira le même parcours que le jour de son exécution :

    « Il entrera par le haut, passera devant la chapelle où il se serait confessé avant de descendre dans la clairière », retrace l’Elysée.

    Une veillée funéraire par différentes personnalités, dont l’identité n’a pas filtrée, est prévue pendant au moins deux heures.

     

    Un hommage populaire est également prévu, organisé le 21 février dans l’après-midi par le PCF et la CGT dans les rues de Paris.

    Fabien Roussel, secrétaire national du PCF, et Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT, prendront la parole pour accompagner symboliquement Missak Manouchian au Panthéon.


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  • À la tête de la FNSEA,

    qui est Arnaud Rousseau,

    le businessman qui voulait passer pour un paysan ?

     

    Arnaud Rousseau, président de la FNSEA depuis 2023, est un patron avant tout. L’écologie et l’Europe lui servent d’épouvantail pour masquer le monde qui le sépare de l’éleveur du Gers, qu’il prétend représenter avec son syndicat.

     

    Arnaud Rousseau, le président de la FNSEA, élu en 2023,
    est aussi dirigeant d'une grosse quinzaine d'entreprises.

     

    Arnaud Rousseau a un grand nombre de casquettes, ou plutôt de chemises.

    Si celle-ci est à carreaux, il incarne l’agriculteur et le dirigeant de la FNSEA, principal syndicat du secteur.

    Lorsqu’elle est bleu pâle avec cravate en soie, on est face au grand patron, habitué des assemblées générales d’actionnaires et qui parle en millions d’euros.

     

    Arnaud Rousseau est un homme très occupé.

    On le retrouve administrateur ou dirigeant d’une grosse quinzaine d’entreprises, de holdings et de fermes : directeur de la multinationale Avril (Isio4, Lesieur, Matines, Puget, etc.), administrateur de la holding du même nom, directeur général de Biogaz du Multien, spécialisé dans la méthanisation, administrateur de Saipol, leader français de la transformation de graines en l’huile, président du conseil d’administration de Sofiprotéol, qui finance des crédits aux agriculteurs.

    La liste est longue.

     

    Comme patron d’exploitations agricoles, il ne possède pas moins de 700 hectares, principalement des céréales oléagineuses (colza, tournesol) mais aussi du blé, de la betterave, du maïs, et de l’orge.

    Il est aussi maire (sans étiquette) de sa commune Trocy-en-Multien (Seine-et-Marne) et vice-président de la communauté de communes du pays de l’Ourcq.

     

    Deux classes d’agriculteurs bien différentes

    Sur sa biographie officielle du groupe Avril, il est dit qu’Arnaud Rousseau a « un parcours atypique ».

    Pour un agriculteur, certes, beaucoup moins pour un dirigeant, puisqu’il est diplômé de l’European Business School de Paris et qu’il est passé un temps par le courtage de matières premières agricoles, c’est-à-dire leur mise en vente sur les marchés financiers.

     

    Ces contradictions se retrouvent dans ses prises de position.

    Il défend une agriculture productiviste française pour nourrir les Français, mais consacre ses champs à une production majoritairement destinée à l’export.

    Il soutient les agriculteurs qui se plaignent de l’augmentation des taxes sur le gazole non routier (GNR), mais il a entériné cette hausse cet été, lors des négociations avec le gouvernement sur le projet de loi de finances.

     

    Avec ses homologues grands céréaliers, il est l’un des principaux bénéficiaires de la PAC, quand les petits éleveurs, ceux-là mêmes dont la colère déborde dans le Sud-Ouest, sont les plus lésés.

    Ce sont deux classes d’agriculteurs bien distinctes, aux intérêts antagonistes.

    C’est pourquoi il ne peut répondre aux demandes des manifestants sur la hausse du GNR, qu’il a validée, ni sur les marges des groupes agroalimentaires, lui qui en dirige un.

    Alors, Arnaud Rousseau a un bouc émissaire tout trouvé : l’Europe et ses normes écologiques.


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  • Amélie Oudéa-Castéra :

    un lobbying très actif

    au service d’une école privée hors contrat,

    contre l’avis de l’Éducation nationale

     

    La nouvelle ministre de l’Éducation nationale, déjà embourbée dans l’Affaire Stanislas et confrontée à la défiance du corps enseignant, a selon des révélations de « Mediapart » activement œuvré pour faire en sorte qu’une école privée hors contrat, dirigée par une de ses connaissances, soit contractualisée. Au mépris des conséquences pour l’école publique et contre l’avis des services de l’Éducation nationale.

    Amélie Oudéa-Castéra, la nouvelle ministre de l’Éducation nationale est confrontée à de nouvelles révélations confirmant sa proximité problématique avec le monde de l’enseignement privé.
     

    En ce jour de mobilisation massive des personnels de l’Éducation nationale,

    ces nouvelles révélations risquent bien d’alimenter la défiance à l’égard d’Amélie Oudéa-Castéra.

    La ministre de l’Éducation nationale, qui depuis son intronisation mi-janvier à la tête d’un « superministère », multiplie les bévues démontrant son peu d’appétence pour l’école publique, a selon Mediapart activement travaillé, bien avant de devenir ministre des Sports, à la promotion d’une école privée hors contrat, dirigée par l’une de ses connaissances, Michel Naniche, un professeur de mathématiques et amateur de tennis.

     

    Le but de ses démarches insistantes ?

    Faire en sorte que cette école, dénommée Diagonale, obtienne gain de cause dans sa requête de passer sous contrat avec l’État, promesse d’une manne financière pour cet établissement, accueillant notamment des jeunes sportifs (de la primaire à la prépa), qui facture ses droits d’entrée de 4 900 à 6 900 euros l’année.

     

    « Les écoles du modèle de Diagonale,

    il faut qu’on arrive à les faire fleurir »

     

    Ce passage sous contrat était par ailleurs devenu une urgence pour l’école, confrontée à une baisse de ses résultats et à une vague consécutive de départs de ses élèves, après la mise en place du nouveau système de contrôle continu, réputé plus favorable (il représente désormais 40 % de la note finale pour les élèves du public et du privé sous contrat).

    Dès lors, Amélie Oudéa-Castéra aurait démultiplié ses efforts.

    « Les écoles du modèle de Diagonale (…), il faut qu’on arrive à les faire fleurir », aurait ainsi plaidé dès 2022, selon le journal en ligne, la ministre auprès des plus hauts services de l’Éducation nationale, seuls compétents pour trancher.

    Ils ont sans surprise opposé un avis défavorable à ses demandes « répétées » dont les conséquences seraient difficilement passées inaperçues.

     

    Comment, en effet, faire passer un transfert, à la charge de l’État, de la rémunération de plusieurs dizaines de postes d’enseignants « équivalents temps plein » au sein de cet établissement, présent dans quatre académies, dont Paris, alors que, dans la capitale, une centaine de postes y ont déjà été supprimés cette année dans le second degré.

    Comment encore faire passer cette concurrence déloyale, avec l’argent du contribuable, pour les écoles publiques qui œuvrent aussi sur ce créneau des horaires aménagés pour les élèves sportifs ?

     

    Interrogés par Mediapart, deux hauts fonctionnaires de l’Éducation nationale ont confirmé ces réticences : « La spécificité de l’offre pédagogique de Diagonale (horaires d’enseignement plus faibles que les programmes requis) et les retraits d’emplois par ailleurs prévus dans l’enseignement public comme privé sous contrat à Paris du fait de la baisse démographique, ne permettent pas de passer sous contrat les classes de Diagonale », ont-ils répondu au média en ligne.

    Un arbitrage devant donner lieu à une décision définitive devrait pourtant, selon les deux fonctionnaires, commencer en février ou en mars.

    Pas sûr que la présence d’Amélie Oudéa-Castéra à la tête du ministère soit désormais considérée comme une aubaine par la direction de l’école Diagonale.

     

    En attendant, les révélations de « Mediapart » ont de nouveau suscité des remous et de multiples réactions parmi la classe politique face à cette promotion tous azimuts, parmi les hautes sphères de l’État, de l’école privée, dont témoignent les affaires récemment mises au jour par la presse.

    Le sénateur communiste Pierre Ouzoulias a notamment réagi sur son compte X (ex-Twitter), en formulant trois propositions :

    - un « moratoire sur l’ouverture de nouvelles écoles privées

    – (la) Constitution d’une commission d’enquête parlementaire pour faire la lumière sur toutes les dérives existantes dans les écoles privées sous contrat »

    -ainsi que « l’audition de Madame Brigitte Macron, qui semble jouer un grand rôle dans la promotion de l’école privée dans notre pays, au mépris de notre école publique. »


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  • Député communiste israélien

    Ofer Cassif :

    « Le monde entier doit savoir

    que le gouvernement d’Israël

    est fasciste et antidémocratique »

    Le comité d’éthique de la Knesset veut faire taire le député communiste israélien Ofer Cassif et demande la déchéance de ses fonctions et son expulsion du Parlement. L’élu dénonce ces méthodes et réaffirme son combat pour la paix.

     

    Le comité d’éthique de la Knesset vient de décider, à 14 voix pour, 2 contre et une abstention, de saisir l’ensemble des membres du Parlement pour expulser définitivement le député communiste Ofer Cassif, coupable d’avoir soutenu la démarche de l’Afrique du Sud devant la Cour de justice internationale (CIJ).

     

    Seul élu juif non sioniste, il s’est toujours battu pour la paix et l’égalité des droits entre tous les citoyens israéliens, quelle que soit leur confession.

    Parallèlement, Ofer Cassif s’est fait le porte-voix de la lutte contre l’occupation et la colonisation, et a défendu la création d’un État de Palestine au côté de celui d’Israël.

    Il a été plusieurs fois agressé par la police lors de manifestations, notamment dans le quartier de Cheikh Jarrah, dans Jérusalem-Est occupée. Déjà suspendu du Parlement, il paye aujourd’hui son combat pour la liberté et la justice. Pour autant, le député n’entend pas renoncer à ses convictions.

     

    Le comité d’éthique de la Knesset cherche à vous exclure du Parlement. Pourquoi ?

    Il s’agit d’une persécution à caractère politique.

    Le comité d’éthique s’appuie sur une loi adoptée en 2016 qui permet à tout membre de la Knesset d’expulser un autre membre élu.

    Une mesure totalement antidémocratique puisque cela favorise une tyrannie de la part de la majorité.

    Cette loi peut être invoquée pour trois raisons : le soutien au terrorisme, le soutien à la lutte armée contre Israël ou le soutien au racisme.

     

    Le député qui a entamé la procédure d’expulsion à mon encontre s’appelle Oded Forer.

    Il appartient à un parti d’extrême droite (Israel Beytenou – NDLR), pour ne pas dire un parti fasciste.

    Il affirme qu’en signant l’appel de l’Afrique du Sud pour diligenter une enquête de la Cour internationale de justice (CIJ) contre Israël, je soutiens la lutte armée contre le pays.

     

    C’est absurde, je n’ai jamais soutenu la lutte armée contre Israël.

    Au contraire, je me suis toujours positionné en faveur des actions non violentes, non pas contre Israël, mais contre l’occupation. De plus, la pétition que j’ai signée demande un cessez-le-feu pour mettre fin à la guerre. En d’autres termes, un appel pour stopper les combats équivaudrait à soutenir la guerre. Ça n’a aucun sens.

     

    Vous avez également été sous le coup d’une suspension. Pour quelles raisons ?

    Il y a trois mois, on m’a suspendu pour quarante-cinq jours. Les lecteurs de l’Humanité doivent savoir que, depuis le 7 octobre, une persécution existe de manière continue pour réduire au silence toute voix divergente, qui ne serait pas conforme au discours dominant.

    Des étudiants n’ont plus le droit d’aller en cours parce qu’ils ont posté sur les réseaux sociaux un message contre la guerre. Des gens ont été licenciés, certains ont été arrêtés et d’autres ont subi des interrogatoires pour les mêmes raisons. Ils ne soutiennent pas le Hamas.

    Aucun d’entre nous ne soutient cette organisation islamiste. Au contraire, nous sommes totalement anti-Hamas. Dès le début, nous avons condamné le massacre et exprimé notre dégoût et notre opposition à ce crime du 7 octobre.

    « Sous l’écran de fumée de la guerre à Gaza, il y a toutes les tentatives de transformer Israël en une dictature. »

     

    Pourtant, toutes les structures d’État sont utilisées pour nous museler.

    La police s’est transformée en une sorte de milice privée du ministre de la soi-disant Sécurité nationale. C’est une persécution systématique et une répression contre quiconque élève la voix contre la guerre et contre tout mouvement de sympathie envers les civils innocents de Gaza qui ont été tués par milliers.

    Ce n’est pas une surprise. Mais le monde entier doit savoir que le gouvernement d’Israël est un gouvernement fasciste et antidémocratique.

     

    Quels sont vos moyens de défense face à la décision du comité d’éthique de vous exclure ?

    Plusieurs étapes sont nécessaires pour pouvoir expulser un membre de la Knesset.

    Premièrement, déposer une motion (soit dit en passant, sans même examiner la teneur des propos) et obtenir la signature d’au moins 70 députés sur les 120 qui composent la Knesset. Me concernant, l’élu d’extrême droite Oded Forer en a obtenu près de 90.

    Deuxièmement, le comité se réunit. Cela a eu lieu les 29 et 30 janvier, où j’ai été entendu, de même que mon avocat.

    Enfin, si 13 des 17 membres de la commission sont favorables à l’expulsion, alors le dossier est transmis à la Knesset. C’est ce qui vient d’avoir lieu, ce mardi.

    L’assemblée plénière doit désormais se réunir, d’ici dix jours et avant vingt et un jours pour voter pour ou contre l’expulsion. Pour qu’il y ait expulsion, il faut au moins 90 voix sur les 120.

    Si l’assemblée vote mon expulsion, je saisirai la Cour suprême en ultime recours. Si la Cour suprême confirme l’expulsion qui a été votée par le Parlement, je perds définitivement mon siège de député à la Knesset.

    Si la Cour suprême révoque la décision du Parlement, je conserve ma fonction et je continuerai à défendre ma liberté d’expression et la fin de la guerre.

     

    Pourquoi une telle procédure à votre encontre ? Le gouvernement craint-il l’exercice légitime de la liberté d’expression des députés de la Knesset ?

    Le plus dangereux n’est pas ce qui peut m’arriver mais la pente glissante sur laquelle nous emmène ce gouvernement.

    S’ils peuvent faire taire un député parce qu’il a signé une pétition, alors ils n’auront aucun mal à empêcher quelqu’un de brandir une pancarte contre l’occupation en l’accusant d’allégeance à l’ennemi.

    Le lendemain, quelqu’un pourra être arrêté pour avoir dit que les colonies sont illégales au prétexte que de tels propos sapent le moral de la société israélienne.

    Et au final, toute critique du gouvernement sera criminalisée.

    Sous l’écran de fumée de la guerre à Gaza, il y a toutes les tentatives de transformer Israël en une dictature.

     

    Avec mes collègues, nous ne sommes pas contre l’État, mais contre le gouvernement.

    Et si nous pensons que celui-ci viole les droits fondamentaux des citoyens, qu’il s’agit d’une politique qui met la société israélienne en danger, ce n’est pas seulement notre droit, c’est notre devoir d’arrêter cela. C’est exactement ce que j’ai fait. Et je vais continuer.


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  • "Shoah" sur France 2 :

    un film mémoire de dix heures de Claude Lanzmann

    sur le génocide des juifs d'Europe par les nazis

    À l'occasion de la Journée de la mémoire des génocides et des crimes contre l’humanité, qui commémore également la libération du camp d'Auschwitz le 27 janvier 1945, France Télévisions propose "Shoah", le film événement de Claude Lanzmann, mardi 30 janvier.
     
    Pourquoi est-il important de regarder ce récit fleuve ?
    Réponse en sept points.
     
     
     

    Montée de l'antisémitisme en France :

    "Enseigner l'histoire de la Shoah est fondamental

    mais ce n'est pas le seul moyen de le combattre",

    estime un historien

    En dépit des témoignages et des cours d'histoire,
    l'antisémitisme est toujours vivace en France.
    France 2 rediffuse mardi soir le documentaire fleuve
    "Shoah" de Claude Lanzmann.
    "C'est le premier film qui va au cœur du processus de destruction", explique l'historien Tal Bruttmann
     

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  • Loi immigration :

    « Darmanin se réjouit,

    mais c’est surtout la victoire du cynisme en politique »,

    analyse Serge Slama

     

    Le juriste Serge Slama juge les « sages » peu ambitieux dans leur décision sur la loi Darmanin, qu’ils étudiaient ce 25 janvier

     

     Le texte a été censuré à hauteur de 40 % par le Conseil constitutionnel.

     

    Professeur de droit public à l’université Grenoble-Alpes et membre de l’Institut Convergences Migrations, Serge Slama juge la censure du Conseil constitutionnel d’un tiers des articles de la loi immigration adoptée par le Parlement.

    Il appelle, en outre, la gauche à se remobiliser sur les questions liées à l’immigration.

     

    Comment analysez-vous la décision que vient de prendre le Conseil constitutionnel ?

    Ça n’est pas très ambitieux, mais le travail a été sérieusement fait concernant les cavaliers constitutionnels, c’est-à-dire les dispositions prévues par le texte qui n’avaient rien à voir avec le sujet.

    C’est le cas du durcissement de l’accès aux prestations sociales, des restrictions faites au regroupement familial ou de l’instauration d’une caution pour les étudiants étrangers.

     

    J’avais ciblé une trentaine de cavaliers législatifs parmi les dispositions les plus contestées. Le compte y est.

    Il censure en outre trois articles sur le fond, dont notamment l’instauration de quotas migratoires fixés par le Parlement.

    Il y avait une forte jurisprudence sur ce sujet.

    En fin de compte, toutes ces réserves et censures étaient attendues.

     

    Les articles de loi restants ne garantissent pas, pour autant, qu’on réserve un meilleur sort aux immigrés en France…

    En effet, le Conseil constitutionnel laisse passer plusieurs « chameaux » législatifs dont on va souffrir longtemps, en particulier la disposition instituant un juge unique à la Cour nationale du droit d’asile.

    Et il ne reste rien des aspects plus positifs du texte, mis à part peut-être sur l’interdiction de rétention des mineurs, qui fait tout de même suite à douze condamnations de la France par la Cour européenne des droits de l’homme à ce sujet.

    Et les dispositions qui concernent les régularisations sont rendues presque inopérantes.

     

    Doit-on penser que l’exécutif a finalement réussi un coup législatif ?

    Le gouvernement a joué avec le feu et cela a marché.

    Le texte va bel et bien être promulgué.

    L’exécutif était en difficulté et il a parié sur le scénario le plus improbable, en laissant sciemment passer des mesures de droite et d’extrême droite qui n’avaient pas leur place dans le texte.

    On peut tout de même se questionner sur la méthode : laisser légiférer à partir des pires visions sur l’immigration en espérant que le Conseil constitutionnel fasse ensuite le ménage…

    Gérald Darmanin se félicite de voir son texte adopté, mais, en fin de compte, c’est surtout la victoire du cynisme en politique.

    On aurait pu éviter tout cela si les parlementaires et le gouvernement avaient été soucieux de respecter la Constitution.

     

    Est-ce pour autant une défaite pour tous ceux qui se sont mobilisés contre la loi immigration, notamment ce 21 janvier ?

    Non, ce n’est pas la fin de la partie.

    La loi Pasqua avait été elle aussi censurée en grande partie, comme la loi Debré, ensuite.

    Les grèves de la faim, les occupations d’églises ont tout de même permis d’aboutir à la loi Chevènement, qui n’était certes pas parfaite, mais a permis plusieurs dizaines de milliers de régularisations.

    Une mobilisation ne se construit pas uniquement sur le coup, il faut l’établir dans la durée.

     

    Cela impose aux différentes composantes de la gauche de se remobiliser en termes de politique d’immigration et d’aller au-delà de leur posture actuelle.

    Et pas uniquement d’un point de vue national.

    Le pacte asile immigration adopté au niveau européen est encore bien pire que la loi Darmanin.


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  • A Plouisy, bronca contre l'uniforme...

    « C’est la pétainisation de la France » :

    dans les Côtes-d’Armor,

    les parents d’élèves vent debout contre l’uniforme à l’école

    Seule concernée en Bretagne, la commune des Côtes-d’Armor est censée tester prochainement l’uniforme à l’école. Parents d’élèves et enseignants s’y opposent, mettant en porte-à-faux le maire à l’origine de cette décision, Rémy Guillou.

     
     

    Plouisy (Côtes-d’Armor), correspondance particulière.

     

    « Non à l’uniforme ! »

    Une bande de gamins surexcités s’égosille sur le parterre de la mairie de Plouisy, commune de 2 000 habitants située à quelques encablures de Guingamp (Côtes-d’Armor).

    En cette fin de journée, mardi 23 janvier, une centaine de manifestants est rassemblée pour s’opposer à l’expérimentation de l’uniforme à l’école, annoncée la semaine dernière par Emmanuel Macron en vue d’une éventuelle généralisation en 2026 si les résultats sont concluants.

    Soutenu par le maire, Rémy Guillou (Renaissance), le projet soulève une défiance, dont l’élu affilié à la majorité présidentielle se serait bien passé.

     

    « Il n’y a eu aucune concertation »

    Sur la forme d’abord, ses opposants regrettent de « ne pas avoir été consultés ».

    Rencontré plus tôt dans la journée devant l’école de Plouisy, où sont scolarisés ses enfants, Erwan Bernon témoigne de son amertume :

    « Le problème, c’est d’avoir appris l’information dans les médias.

    Si le maire nous avait prévenus en amont, nous aurions pu en discuter.

    Cela se serait passé autrement, estime le représentant des parents d’élèves.

    Mais il n’y a eu aucune concertation, il a décidé seul. »

     

    Quelques jours auparavant, dans les colonnes de la presse locale, le maire défendait avec conviction cette prise de position, la seule de toute la région Bretagne.

    « Avec une tenue unique, tout le monde sera sur un pied d’égalité pour acquérir des connaissances », avançait cet ancien enseignant et inspecteur académique dans le Télégramme, avouant cependant avoir été pris de court par l’annonce du chef de l’État.

    « Je ne pensais pas que la carte des communes favorables à l’expérimentation serait dévoilée (si tôt)… C’est prématuré à mon goût. »

     

    C’est une rencontre fin novembre avec l’actuel premier ministre, lors du Congrès des maires, qui aurait amorcé le projet.

    Maxime Calvez, également parent d’élève, est tout aussi remonté contre une décision qui « court-circuite l’administration de l’éducation nationale. Même les parents qui n’étaient pas forcément opposés à l’uniforme ont fait savoir qu’ils étaient contre cette manière de faire ».

    D’où l’organisation d’une manifestation en marge d’une réunion à la mairie de Plouisy, le soir même, entre élus, représentants des parents d’élèves et enseignants, censée apaiser les tensions.

     

    Une question de coût et d’idéologie réactionnaire

    « Sur le fond, j’estime que l’uniforme ne résoudra pas les problèmes, confie le jeune père de famille, fier de scolariser ses enfants dans le public.

    Moi, par exemple, j’ai une petite fille très coquette. Elle aura beaucoup de mal à s’y faire. Et mon fils lui, il flingue une tenue par semaine. Sachant que pour l’uniforme, on parle d’environ 400 euros à l’année… »

    Comme beaucoup d’autres, Maxime Calvez souligne aussi et surtout le manque de preuves scientifiques formelles pour attester des bienfaits supposés de la tenue unique.

    Pour Erwan Bernon, ancien gilet jaune, l’écueil est aussi idéologique. « Cela nous fait revenir soixante-dix ans en arrière. C’est la pétainisation de la France. On voit bien qu’il y a les élections européennes qui approchent, avec un gouvernement de plus en plus proche de l’extrême droite. »

     

    Du côté des syndicats enseignants présents lors du rassemblement à Plouisy, on estime que le débat sur l’uniforme occulte d’autres problématiques, comme les fermetures de classes ou le manque d’Atsem (agent territorial spécialisé des écoles maternelles).

    « Et si le gouvernement voulait vraiment s’intéresser aux inégalités, il pourrait se pencher sur la pauvreté qui explose et se répercute à l’école, tacle Stéphane Mottier, du Snudi-FO 22, l’un des syndicats qui représente le personnel de l’enseignement public.

    L’uniforme est un cache-misère. »

     

    Le maire botte en touche

    Tandis que les prises de parole s’enchaînent devant la mairie, à l’intérieur, l’atmosphère se tend.

    L’agacement de la directrice de l’école et des enseignants est palpable.

    À la sortie, le maire esquive maladroitement les questions des journalistes présents.

    « Je suivrai la décision du conseil d’école et le choix des parents sera respecté », lâche finalement Rémy Guillou, vraisemblablement agacé par la tournure des événements.

    Un désaveu à demi-mot mais qui ne résout pas tout.

     

    À quelques mètres de lui, Bérenger Le Négaret, représentant des parents d’élèves, revient sur la discussion qui vient d’avoir lieu.

    « La directrice a consulté ses responsables hiérarchiques et il n’est pas possible d’organiser un conseil d’école extraordinaire, ni de mettre ce sujet à l’ordre du jour. On a proposé au maire de prendre contact directement avec le ministère, ce qu’il a refusé. On n’a strictement pas avancé sur le sujet »

    Mais, pour lui, les parents ont déjà été consultés et leur souhait est clair : « Ils veulent garder la liberté du choix vestimentaire de leurs enfants, qu’ils soient représentés dans toute leur diversité. »


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  • Jetons de présence, actions gratuites, dividendes :

    ce que contient la déclaration d’intérêts

    d’Amélie Oudéa-Castéra

     

    Jetons de présence, actions gratuites, dividendes, assurance-vie… selon la déclaration d’intérêts et de patrimoine d’Amélie Oudéa-Castéra, en date de juillet 2022, on peut évaluer celui de la ministre de l’Éducation et des Sports autour de 7 millions d’euros.

    Une fortune tirée pour une bonne part de ses années chez Axa.

     
    Amélie Oudéa-Castéra possède un stock d’action Axa
    estimé à 2,8 millions d’euros.

     

    Depuis sa promotion au poste de ministre de l’Éducation nationale, de la Jeunesse, des Sports et des jeux Olympiques et Paralympiques, les ennuis planent en escadrille au-dessus de la tête d’Amélie Oudéa-Castéra.

    Après ses propos polémiques sur l’école publique et sa malencontreuse publicité pour l’enseignement privé, pas un jour ne passe sans qu’elle ne soit épinglée pour ses revenus extravagants dans ses fonctions précédentes.

    Alors que les ministres disposent encore d’un mois et demi pour déposer leur déclaration d’intérêts et de patrimoine à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), un décret énumérant toutes les affaires dans lesquelles Amélie Oudéa-Castéra devra se déporter a été publié, mardi 22 janvier, au Journal officiel, et la liste, encore incomplète peut-être, est déjà fort longue : Axa, Carrefour, Société générale, Capgemini, Sanofi, la start-up Sportbudiz, la Fédération française de tennis, l’association Rénovons le sport français et l’établissement privé Stanislas où elle a scolarisé ses enfants…

     

    Un rouage du capitalisme hexagonal

    Jusqu’à ce funeste mois de janvier, dans les journaux économiques, le parcours d’Amélie Oudéa-Castéra se narrait plutôt à la flûte et avec des brassées de fleurs.

    C’était l’histoire d’une championne de tennis junior qui bifurque vers les grandes écoles, l’Essec puis l’ENA, avant de débuter, dans sa très brève carrière dans la haute fonction publique, comme auditrice à la Cour des comptes, puis d’embrasser par la suite le CAC 40…

    Selon sa propre légende, après l’avoir repérée dans une gazette interne de l’ENA qui évoquait son parcours atypique, Daniel Bouton, le patron de la Société générale, avait dépêché son directeur financier, Frédéric Oudéa, pour la recruter.

    Cela s’était soldé par une partie de tennis, puis une autre, ensuite des affinités, enfin un mariage et trois enfants…

     

    Mais une autre lecture, basée sur la reproduction des élites économiques en France, s’impose, en vérité.

    Frédéric Oudéa, ancien élève de l’ENA et de Polytechnique, conseiller de Nicolas Sarkozy dans les années 1990 au sein du gouvernement Balladur (tandis que le père d’Amélie, Richard Castéra, haut fonctionnaire et dirigeant chez Publicis, œuvrait au cabinet de Claude Goasguen), fait entrer son épouse chez le géant français des assurances Axa, au cœur des rouages du capitalisme hexagonal.

    La jeune femme occupe vite un poste de haut niveau non loin d’Henri de Castries, le successeur de Claude Bébéar, et un premier strapontin comme administratrice de Lagardère qui cherche à « féminiser » ses instances.

     

    Sa déclaration d’intérêts retirée du site de la HATVP

    Et ainsi de suite : Amélie Oudéa-Castéra aura toujours plus de jetons de présence pour avoir assisté à quelques réunions au conseil d’administration du fonds d’investissement Eurazeo, d’autres chez Plastic Omnium, dont le PDG a été un temps président de l’Association française des entreprises privées (Afep), le puissant lobby des très grandes multinationales françaises…

    Sous le mandat de Geoffroy Roux de Bézieux à la tête du Medef, Amélie Oudéa-Castéra copréside également une commission dédiée aux « mutations technologiques et impacts sociétaux ».

    Après une première tentative, infructueuse, de rentrer au gouvernement, à la suite de la première victoire d’Emmanuel Macron, elle finit par débarquer à Carrefour, autre entreprise majeure où se côtoie la fine fleur des hauts fonctionnaires passés aux affaires.

     

    Ce parcours oligarchique à la française, dans l’entre-soi et hors-sol à la fois, on en trouve des traces dans la première déclaration d’intérêts et de patrimoine d’Amélie Oudéa-Castéra, en date de sa première entrée au gouvernement, déposée en juillet 2022.

    Dans l’attente de son actualisation, le document a été retiré du site de la HATVP, mais à partir de son contenu, qu’exhume l’Humanité aujourd’hui, il permet de mesurer plus globalement les gigantesques profits engrangés et de révéler, dans la foulée, sans doute, un monde séparé du reste de la société…

    Dans les faits, Amélie Oudéa-Castéra a perçu une rémunération nette

    de 647 000 euros d’Axa (pour un an, entre juin 2017 et mai 2018),

    de 1,53 million d’euros chez Carrefour (entre novembre 2018 et mai 2021)

    et 521 000 euros à la Fédération française de tennis (entre mars 2021 et mai 2022).

    Elle a également touché 164 000 euros net pour sa participation au conseil d’administration de Plastic Omnium entre 2017 et 2022,

    et 135 000 euros pour le même – léger – exercice chez Eurazeo.

     

    Un patrimoine total estimé à 7 millions d’euros

    Mais, au-delà de ces revenus, elle peut compter sur les actions gratuites qu’elle a reçues chez Axa comme chez Carrefour : au cours actuel, la valeur de son stock d’actions Axa peut être estimée autour de 2,8 millions d’euros ; pour le géant de la grande distribution, ses titres avoisinent les 700 000 euros.

    De quoi lui apporter, rien que sur ces deux titres de son portefeuille, des dividendes autour des 180 000 euros l’année dernière.

    Dans sa déclaration de patrimoine, en juillet 2022, la ministre de l’Éducation évoquait, encore, la détention d’une quote-part de 10 % sur une maison parisienne de 469 mètres carrés pour une valeur vénale de 960 000 euros.

    En plus d’un PEA déclaré à 143 000 euros, elle était également détentrice de plusieurs contrats d’assurance-vie et plan épargne-retraite chez Axa et à la Société générale pour un montant global de 2,36 millions d’euros.

     

    Au total, Amélie Oudéa-Castéra, seule,

    et sans prendre en compte les revenus plus astronomiques de son mari, devenu patron de Sanofi,

    peut revendiquer un patrimoine autour des 7 millions d’euros.

     

    De quoi, loin des envolées rhétoriques sur la « méritocratie »,

    donner des envies furieuses de sécession, à Stanislas ou ailleurs…


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